Olivier Père

Le Rideau déchiré et L’Étau de Alfred Hitchcock

ARTE conclut son cycle « Alfred Hitchcock, dernière période » avec la diffusion lundi 11 novembre de L’Étau (Topaz,1969) à 21h55, suivi du Rideau déchiré (Torn Curtain, 1966) à 23h55. Dans la seconde moitié des années 60, Alfred Hitchcock réalise deux films d’espionnage qui ont pour théâtre la Guerre Froide. Le Rideau déchiré et L’Étau sont considérés comme des grands films malades d’Alfred Hitchcock. Le cinéaste, privés de certains de ses collaborateurs artistiques clés, se retrouve confronté à des difficultés nouvelles. Lors de la préparation du Rideau déchiré, Hitchcock se fâche définitivement avec son compositeur fétiche Bernard Herrmann, dont il refuse la partition. Le cinéaste fut également mécontent de sa collaboration avec Paul Newman. Cette star de la nouvelle génération, imprégné de la méthode de l’Actors Studio, eut du mal à rivaliser avec le professionnalisme docile de James Stewart ou Cary Grant. Le Rideau déchiré contient une des scènes les plus mémorables du cinéma d’Hitchcock : le meurtre d’un agent de la Stasi qui prend à rebours tous les clichés. La scène est longue, cruelle, pénible. Privée de musique, elle confirme le souci d’une représentation réaliste du crime de la part du réalisateur à la fin de sa carrière.

L’Étau prend comme toile de fond la crise des missiles cubains durant la Guerre Froide. Il est adapté d’un roman touffu de Leon Uris qu’Alfred Hitchcock eut beaucoup de mal à s’approprier. Le plus atypique reste la construction chorale du film. Il est constitué de plusieurs morceaux de bravoure qui ont la particularité d’avoir toujours des protagonistes – et des localisations géographiques – différents. Le héros n’a rien à faire. Ce sont au contraire des personnages secondaires qui attendent leur tour et disparaissent une fois leur numéro accompli. La scène de la mort d’une espionne, assassinée par un leader castriste amoureux d’elle, est sublime. Sa composition est digne d’une peinture futuriste. Il n’est question que de trahisons et de mensonges dans L’Étau, qui baigne dans un climat cynique et glacial. Aux mensonges d’état s’ajoutent les mensonges conjugaux, puisque le couple central se trompe mutuellement. Ce monde violent et sans morale témoigne du pessimisme d’Hitchcock à la fin de sa vie.

 

 

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