"Louise" de Charpentier au Festival d'Aix-en-Provence

Jeune ouvrière, Louise sent vibrer en elle les promesses de la grande ville. Résolue à quitter son étouffante famille, elle décide d'aller vivre à la capitale son amour pour Julien, un poète désargenté. Malgré l'enthousiasme qu'engendre sa nouvelle liberté, son bonheur est autant troublé par la culpabilité qu'elle ressent d'avoir abandonné ses parents que par la pression sociale…

L'emprise d'un père
Immense succès à sa création en 1900 à l'Opéra-Comique, le "roman musical en quatre actes et cinq tableaux" de Gustave Charpentier (1860-1956) fut éreinté par la critique, qui jugeait scandaleuse sa représentation du désir féminin et la révolte de son héroïne contre sa famille. Réputé pour ses mises en scène à la dramaturgie fouillée, sa direction d'acteurs précise et son esthétique épurée, Christof Loy (Salomé) a décelé, derrière le propos novateur sur l'émancipation féminine, un non-dit du livret de Charpentier : la relation familiale toxique dans laquelle Louise se trouve enfermée et l'emprise que le père possessif – voire abusif – exerce sur elle avec la complicité de sa mère. Désireux de raconter sans juger les personnages, le metteur en scène fait entrer le spectateur dans l'inconscient de Louise et met en lumière les zones d'ombre d'une société qui, loin d'affranchir ses filles, ne leur offre que des romances de pacotille pour sublimer un horizon borné de frustrations. Dans cette nouvelle production du Festival d'Aix-en-Provence, la soprano Elsa Dreisig (Così fan tutte) est entourée d'une brillante distribution.