Olivier Père

Les Huit Salopards de Quentin Tarantino

ARTE diffuse Les Huit Salopards (The Hateful Eight, 2015) de Quentin Tarantino dimanche 7 juin à 20h55.

En réunissant huit durs-à-cuire de l’ouest sauvage, sept hommes et une femme, dans un relais de diligence perdu au milieu du Wyoming, Quentin Tarantino ne se contente pas de signer un western référentiel de plus, bourré jusqu’à la gueule de dialogues virtuoses, prononcés avec gourmandise par ses acteurs de prédilection. Le film a l’ambition de ressusciter les fantômes de la guerre civile américaine. Tarantino attribue à certains personnages un lien précis avec les deux camps adverses. Le massacre qui va bientôt éclater au cœur de ce huis-clos tendu à l’extrême ravive les plaies restées ouvertes du conflit fratricide. Au-delà de ce commentaire historique moins superficiel qu’il n’y paraît, Tarantino démontre dans Les Huit Salopards sa maîtrise absolue de la mise en scène. L’ouverture du film, sur la musique lancinante de Morricone, expose des paysages grandioses de montages enneigées pour mieux les faire disparaître de l’écran dans les 2h48 qui vont suivre. Puis le générique défile sur la statue d’un christ en croix, annonciateur de souffrances physiques, tandis que la diligence se profile à l’horizon. La gestion de l’espace confiné du relais, magnifiquement scénographié par le directeur artistique Yohei Taneda, est à la fois spectaculaire et d’une redoutable intelligence. Le cinéaste parvient à donner à ce suspens théâtral une dimension épique, avec le recours au format de tournage et de projection 70 mm, et une structure temporelle toujours aussi inventive. La partition originale de Ennio Morricone – un choix inhabituel chez Tarantino – vaudra enfin au musicien italien le premier oscar de sa longue carrière. Plusieurs éléments laissent penser que Les Huit Salopards est un film d’horreur travesti en western, davantage qu’une relecture de son premier long métrage Reservoir Dogs, . L’omniprésence de la neige, le retour de Kurt Russell en chasseur de primes buriné et les explosions de violence gore rappellent The Thing de John Carpenter. Jennifer Jason Leigh fait une entrée inoubliable dans l’univers de Tarantino. L’actrice délivre une performance géniale en monstrueuse incarnation du Mal.

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