ARTE diffuse lundi 5 janvier à 20h50 l’admirable Violence et Passion (Gruppo di famiglia in un interno, 1974) de Luchino Visconti, sans doute l’un des plus beaux films du grand réalisateur italien, au soir de sa carrière. Un vieux professeur (Burt Lancaster) qui vit en autarcie dans sa maison romaine chargée de livres d’art, de tableaux et de souvenirs est dérangé par l’intrusion d’une comtesse (Silvana Mangano) qui insiste pour louer le deuxième étage de sa demeure afin d’y loger sa fille, son ami ainsi que Konrad, un gigolo (Helmut Berger). Le professeur est ulcéré par la vulgarité de ce petit monde aristocratique en voie d’embourgeoisement, sans aucune culture ni éducation. Mais il constate l’intelligence de Konrad, cachée sous son cynisme de prostitué, et se lie d’amitié avec le jeune homme, qui devient durant une courte période le fils qu’il n’a jamais eu. Les derniers films de Visconti, marqués par la maladie et le désespoir, souffrirent longtemps de la comparaison avec ses grands chefs-d’œuvre avant que ne resplendisse leur dimension funèbre. Le cloisonnement de l’action dans un appartement reconstitué en studio témoigne du mépris de Visconti devant le monde moderne mais s’explique aussi par sa paralysie qui l’empêchait désormais de mettre en scène d’amples fresques comme Ludwig. Violence et Passion demeure, avant l’épure glaciale de L’Innocent, le somptueux testament moral et artistique du cinéaste, qui exacerbe son goût pour la tragédie et le décadentisme. Ce repli sur soi n’implique aucune forme de renoncement, politique ou esthétique. Visconti évoque dans ce film de chambre l’actualité la plus brûlante (les tentatives de complots ourdies par les grands patrons d’extrême droite), tout en s’enivrant une dernière fois des effluves du temps perdu (les brefs souvenirs proustiens, où surgissent les visages de la mère et de l’épouse du professeur, incarnées par Dominique Sanda et Claudia Cardinale). Un film bouleversant, magnifiquement interprété par Burt Lancaster.
Violence et Passion de Luchino Visconti
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