Nous l’avions revu sur ARTE au moment des fêtes de Noël, il ressort aujourd’hui en salle dans une splendide version numérique – celle que la chaîne avait diffusée, distribué par Les Acacias : L’Homme de Rio (1964) est un classique inégalé du cinéma d’aventures français. Philippe de Broca lui-même nous offrit de beaux moments de cinéma de divertissement avec Cartouche ou Le Magnifique, mais il ne fit jamais mieux entouré d’une fidèle et belle équipe : Daniel Boulanger aux dialogues, Jean-Paul Rappeneau au scénario, Georges Delerue à la musique, et bien sûr Jean-Paul Belmondo en héros casse-cou, bondissant et sympathique. L’Homme de Rio est l’équivalent cinématographique des aventures de Tintin signées Hergé : ligne claire de la mise en scène et de la photographie, qui magnifient les décors naturels et urbains du Brésil, entre favélas colorées, jungle luxuriante et architecture moderne et monumentale de Brasilia ; péripéties, poursuites et action non stop, qui trimbalent notre héros de Paris à Rio à la recherche de sa fiancée enlevée par de mystérieux individus ; McGuffin (un vol d’objets archéologiques précieux) prétexte à une intrigue de sérial avec des cascades et des méchants dignes des meilleurs James Bond (Adolfo Celi reprendra du service un an plus tard dans Opération Tonnerre) ; personnage féminin aussi horripilant qu’irrésistible (la belle Françoise Dorléac) qui renvoie autant à une misogynie très Nouvelle Vague (de Broca fut longtemps considéré comme le pendant commercial des films de Godard, Chabrol et Truffaut) qu’aux ingénues excentriques de la « screwball comedy » hollywoodienne. Ce va-et-vient entre dandysme germanopratin et hommage au cinéma américain, série B et bande dessinée, virtuosité et vocation populaire ne va pas vraiment connaître de postérité en France ailleurs que dans les autres films de de Broca, hélas moins réussis que L’Homme de Rio, comme Les Tribulations d’un Chinois en Chine ou Le Magnifique. En revanche, un jeune cinéaste nommé Spielberg se souviendra de L’Homme de Rio en réalisant presque vingt ans plus tard Les Aventuriers de l’Arche perdue, qui lui emprunte certains épisodes, eux-mêmes inspirés par les serials américains des années 40. Aller-retour transatlantique Hollywood-Paris-Hollywood, comme celui de Tuttle-Melville-Tarantino à propos du film noir. Sauf que L’Homme de Rioest beaucoup plus gracieux, virevoltant et amusant que le premier épisode des aventures d’Indiana Jones, et que chaque nouvelle vision, surtout dans cette restauration numérique, est source de plaisir de d’enchantement.
L’Homme de Rio de Philippe de Broca
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