Olivier Père

Une messe pour Dracula de Peter Sasdy

Une messe pour Dracula

Une messe pour Dracula

Vous vous en êtes sans doute rendus compte mais j’ai quelques marottes de cinéphile et les films de vampires sont l’une d’entre elles. L’occasion de parler de ce film m’est prodiguée par les doubles séances « cinéma bis » de la Cinémathèque française que j’ai vu naître comme spectateur dans la désormais mythique salle République en 1993 (Barbara Steele) et que j’ai programmées de 1997 à 2009 avec la complicité de Jean-François Rauger. Vendredi 2 novembre ce rendez-vous régulier de la vénérable institution dédié au cinéma populaire du monde entier et de tous les âges proposera un hommage à l’acteur Christopher Lee avec deux beaux films, Le Corps et le Fouet de Mario Bava (une splendeur dont je parlerai un jour quand je reviendrai sur l’œuvre de ce cinéaste formidable) et Une messe pour Dracula (Taste the Blood of Dracula, 1970).

Après avoir donné un sang neuf au mythe de Dracula en produisant le premier film de vampires en couleur de l’histoire du cinéma, Le Cauchemar de Dracula (Dracula, 1958) de Terence Fisher, la firme Hammer a exploité le célèbre prince des ténèbres inventé par Bram Stoker dans une série de films proposant une approche de plus en plus dégradée ou iconoclaste du vampirisme.

Une messe pour Dracula du hongrois Peter Sasdy est l’une des meilleures – tardives – séquelles du film de Fisher. C’est au départ un jeune acteur, Ralph Bates, qui devait jouer le vampire. Mais devant la réticence de la Warner, coproductrice avec la Hammer, Christopher Lee dut rempiler une nouvelle fois dans le rôle qui l’avait rendu célèbre. Évolution des goûts du public et relâchement de la censure obligent, Une messe pour Dracula se permet quelques excès de violence et d’érotisme, et nous permet d’apprécier les charmes de la starlette britannique Linda Hayden.

On sait que les studios britanniques de la Hammer ont donné des couleurs aux créatures du fantastique gothique, héritées d’une tradition littéraire exaltant l’irrationnel issue du XIXe siècle. C’est Terence Fisher qui, en 1958, confia à Christopher Lee le rôle du Prince des Ténèbres dans Le Cauchemar de Dracula qui sera avec Frankenstein s’es échappé le coup d’envoi d’une nouvelle vague d’horreur gothique en Technicolor. La Hammer film produira des films jusqu’en 1975, exploitant les principales mythologies du fantastique traditionnel. Celles-ci n’ont évidemment pas échappé au destin d’être transformées, complexifiées, parodiées, mélangées parfois avec d’autres conventions.

Une messe pour Dracula peut être considérée comme une adaptation tardive et impure du mythe. Réalisé en 1969, par le cinéaste d’origine hongroise Peter Sasdy, le film souligne la puissance subversive du personnage. Plus de dix ans après Le Cauchemar de Dracula, celui qui n’était qu’une force instinctive assoiffée de sang devient explicitement le vecteur d’une destruction de l’ordre bourgeois et familial. En séduisant jeunes gens et jeunes filles et en envoyant ceux-ci assassiner leurs parents, le vampire devient littéralement ce qu’il n’était dix ans plus tôt que symboliquement.

Christopher Lee a interprété onze fois à l’écran le comte Dracula, du chef-d’œuvre de Terence Fisher jusqu’à la pochade d’Edouard Molinaro Dracula père et fils, en passant par les déclinaisons sadiques, érotiques ou pop de Roy Ward Baker, Freddie Francis, Jess Franco, Alan Gibson, Peter Sasdy, plus quelques autres vampires au patronyme moins célèbre comme le baron Roderico da Frankurten (Les temps sont durs pour les vampires de Steno) ou Licos (Hercule contre les vampires de Mario Bava). Ce grand cabot a toujours clamé son mépris pour la plupart des films de série B et fantastiques (où il s’est souvent couvert de ridicule il faut bien l’admettre), y compris la série des « Dracula » qui lui apporta gloire et célébrité éternelles, préférant qu’on se souvienne de lui dans La Vie privée de Sherlock Holmes de Billy Wilder où il a un rôle minuscule et sans intérêt. Désormais il squatte les productions à prestige signées Tim Burton ou Martin Scorsese dans des apparitions clins d’œil. De toutes façons c’est désormais pour ses rôles de Comte Dooku dans la nouvelle trilogie « Star Wars » et de Saroumane dans Le Seigneur des anneaux que Lee est mondialement connu aujourd’hui, ces deux « performances » ayant éclipsé pas loin de 280 prestations plus ou moins oubliables au cinéma et à la télévision.

http://www.cinematheque.fr/fr/dans-salles/rendez-vous-reguliers/fiche-manifestation/cinema-bis-christopher-lee,14750.html

 

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