Olivier Père

The Lost City of Z de James Gray

ARTE diffuse The Lost City of Z (2015) de James Gray dimanche 31 janvier à 20h55.

Deuxième incursion dans le passé (le début du XXème siècle) chez James Gray après The Immigrant, The Lost City of Z (son sixième long métrage) offre au cinéaste new-yorkais l’occasion de quitter sa ville natale, théâtre de ses précédentes fictions, pour s’aventurer dans la jungle amazonienne. Inspiré d’un ouvrage historique lui-même inspiré des expéditions de Percy Fawcett, soldat et archéologue anglais, The Lost City of Z ouvre de nouveaux horizons pour James Gray, qui s’était précédemment illustré dans le film noir ou criminel – même son sublime Two Lovers, histoire d’amour impossible, était tendu comme un thriller. Ponctué par trois voyages périlleux en Amazonie, le film de James Gray dresse le portrait d’un homme mu par une idée fixe : laver l’honneur de son nom, restaurer l’image de sa famille et accéder enfin à la gloire militaire. Lors de sa première expédition de cartographie entre la Bolivie et le Brésil, Fawcett, encouragé par des découvertes de restes anciens de poterie, émet l’hypothèse d’une ancienne civilisation qui pourrait être plus ancienne et égaler les civilisations antiques occidentales. The Lost City of Z est l’histoire d’une obsession, d’abord motivée par l’orgueil et la rancune, mais qui va peu à peu se transformer en quête métaphysique. La manière dont progresse le récit du film de Gray est étonnante : à deux reprises, Fawcett touche littéralement du doigt une découverte fabuleuse, avant de devoir rebrousser chemin. Tout au long de sa vie, ses ennemis personnels et la grande histoire – il doit combattre dans les tranchées durant la Première Guerre mondiale – vont se mettre en travers de sa route et compromettre la réussite de son projet. L’ultime voyage, qui réunira le père et le fils, scellera le destin de Fawcett, accompagné cette fois par son fils Jack qu’il n’a pas vu grandir, accaparé par ses missions. Ces retrouvailles tardives entre un père et son fils, longtemps séparés et incapables de s’entendre, constitue sans doute la part la plus intime, et personnelle du film de Gray. Le cinéaste reproduira le même cœur narratif dans son film suivant, Ad Astra, un voyage œdipien dans l’espace à la recherche du père. The Lost City of Z réunit tous les ingrédients du film d’aventures exotiques, avec attaque de piranhas, tribus cannibales, accidents et trahisons. Pourtant, James Gray n’a pas l’intention de réanimer l’esprit de serials à la manière de Spielberg et ses Indiana Jones. Comme à son habitude, il s’approprie un matériau très dense pour l’enrichir d’une dimension psychologique et politique d’une grande modernité. Cette histoire d’hommes n’oublie pas d’accorder une importance capitale à l’épouse de Fawcett, à la fois négligée et adorée par son mari. La seconde collaboration entre Gray et le directeur de la photographie Darius Khondji s’avère une nouvelle fois payante, avec des images splendides et riches en contrastes visuels. Le plan final, où se rejoignent l’univers feutré de l’Angleterre et les profondeurs mystérieuses et mortelles de la jungle, est simplement stupéfiant.

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2 commentaires

  1. Félix dit :

    Plan final de toute beauté, oui.
    Dommage que Gray n’ait visiblement pas fait tout ce qu’il voulait sur le très inégal Ad Astra…

    • Olivier Père dit :

      Ad Astra inégal en effet il semblerait que le studio ait imposé la fin à Gray. Mais les deux films se ressemblent beaucoup et parlent de la relation père-fils et d’un voyage sans retour.

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