Voyages en Italie

Après avoir hésité entre l’Andalousie et la Botte, destination (trop) favorite de Jean-Phi avec ses ex, Sophie et lui s’envolent finalement pour la Sicile. Une manière pour ces parents d’un petit garçon et d'un bébé, laissés à la garde de la grand-mère, de se retrouver. Mais l’escapade prétendument romantique prend l’allure de l’exercice conjugal obligé.

Menus désaccords
En un temps pas si lointain de masques chirurgicaux collés au museau, Sophie Letourneur met en scène l’expédition d’un couple en Italie, qui peine, sur fond de cités siciliennes et d’îles éoliennes volcaniques, à renouer avec l’éruption amoureuse. Suivant, sur le mode du journal intime, les pérégrinations poussives du duo, incarné avec une délicieuse placidité par la cinéaste elle-même et Philippe Katerine, le film se livre à une anatomie amusée de la vie conjugale moderne dans une infinie variation de menus désaccords. Quand lui tente les références culturelles, elle se fiche de n’avoir vu ni Voyage en Italie ni Stromboli de Rossellini, préférant s’arrimer à son Guide du routard. Traînant, à pied ou en scooter, son désenchantement sans gravité, le binôme, couvert d’un épais écran total, cherche, tracas quotidiens en bandoulière, une voie commune dans le désir perdu, avec le mérite de ne jamais feindre l’extase. Filmé au plus près, entre de rares plans panoramiques, le couple, en mal d’inspiration, flotte sur une mer d’indécision. D’une anxiété ronchonne, l’antihéros, qui sue sous le soleil transalpin, traîne la patte maintenue par une attelle, redoutant, de retour à l’hôtel, les effets toxiques du wi-fi, quand Sophie, saisie par le vertige, les prive de la seule prouesse prévue du voyage. À l’heure où le tandem, cette fois flanqué d’une progéniture, revient début juillet 2025 sur les écrans avec L’aventura, une plongée drolatique dans les eaux tièdes – mais non sans charme – de l’ordinaire.