Pour des raisons de droits, ce programme n’est pas disponible dans le pays dans lequel vous vous trouvez.
Devenir celle que je voudrais être
89 min
Disponible jusqu'au 04/09/2025
À la télévision le mardi 8 juillet à 01:05
À travers ses journaux intimes et les fulgurantes images avec lesquelles elle a documenté son quotidien sur cinq décennies, de Prague à Tokyo en passant par Berlin, un saisissant autoportrait de la grande photographe tchèque Libuse Jarcovjáková.
"Je vais et viens comme une folle dans mon appartement. Je ne dors plus la nuit !" Quand Les Rencontres d’Arles lui proposent une rétrospective de son travail, en 2019, Libuse Jarcovjáková, née à Prague en 1952, "attend ce moment" depuis cinquante ans. Longtemps privée d’université car fille d’artistes "idéologiquement faibles", cette photographe tchèque a commencé à documenter son quotidien dès l’adolescence, animée d’un puissant instinct de l’instant. Répression du Printemps de Prague en 1968, propagande dérisoire, corps éreintés et solidarité alcoolisée d’une imprimerie où elle est ouvrière, "boîtier" en bandoulière, mariage erratique avec un cheminot qui cite Nietzsche, avortements, dépression… Cette pionnière de l’autofiction ne vit qu’à travers le cadre de son appareil argentique, en quête d’une liberté indissociable de son identité sexuelle. Dans la grisaille de la normalisation praguoise des années 1970, le Club T., lieu underground de rencontre pour la scène queer locale, offre les couleurs d’une transgression débridée. Jusqu’à cette nuit où un meurtre à proximité vaut aux clichés de Libuse de subir les menaçantes investigations de la sécurité d'État. Un mariage blanc lui permettra de franchir le rideau de fer, mais non de trouver sa place à Berlin-Ouest avant la chute du Mur, dont elle sera plus tard témoin. Elle fuit à Tokyo où, curieusement reconnue, elle devient photographe de mode courtisée à l’époque du règne de la styliste de Comme des Garçons, Rei Kawakubo. Mais au glamour, l’indocile préfère l’ordinaire et les "vrais gens", les bals de Gitans ou l’exil mélancolique des Vietnamiens auxquels, de retour chez elle, elle enseigne le tchèque.
Corps et âme
"Mon appareil est ma boussole." Pendant la crise du Covid-19, la réalisatrice Klára Tasovská s’est immergée dans les flots d’archives de Libuse Jarcovjáková et les "dizaines de milliers de pages de son journal intime" pour tisser la trame de ce récit hypnotique en forme d’autoportrait de la photographe. Sur un demi-siècle, celle-ci a capté à vif jour après nuit les instants chavirés et les âmes cabossées, à commencer par la sienne, dans le miroir. Composé exclusivement de ses clichés, le film dessine la trajectoire d’une artiste sans concession aux fulgurances saisissantes en même temps que les contours d’une époque dans l’ombre du rideau de fer. Battements de coeur, ébats de corps, chutes et sursauts : la cinéaste met en scène et en sons, avec un remarquable sens du rythme, l’odyssée sensible et déjantée de Libuse Jarcovjáková, dont la voix porte l'écho des épreuves qu’elle a traversées, à la conquête inachevée de son identité.
Réalisation
Klára Tasovská
Pays
République tchèque
France
Année
2023
Résolument excentrique, le documentaire d’auteur