Olivier Père

Land of the Dead – Le territoire des morts de George A. Romero

Quatrième épisode de la saga des zombies de George A. Romero, Land of the Dead – Le territoire des morts (Land of the Dead, 2005) se présente comme une super série B postclassique, un petit blockbuster de vidéo-club, et il n’y a rien de péjoratif dans cette désignation. Romero réalise un excellent film d’horreur et d’action où l’on retrouve les éléments de ses précédents films de zombies. Un abri pour les humains, ici à l’échelle d’une ville, est assiégé par des morts-vivants cannibales. Des mercenaires cyniques, d’autres plus compréhensifs et dégoûtés par la violence qui s’est emparée du monde, remplissent leur mission. On retrouve intacte dans Land of the Dead la virulence politique du cinéaste qui assimile les zombies à des rebus de la société, capables de déclencher une véritable révolution menée par le pompiste Big Daddy, un mort-vivant noir doté d’une conscience de classe. Big Daddy devient ainsi l’incarnation ultime du zombie intelligent, concept amorcé dans Day of the Dead où le mort-vivant Bud, enfermé dans un laboratoire scientifique, exprimait des émotions humaines. Land of the Dead, efficace et sans compromis, se montre digne des précédents titres de la saga des zombies. Après une traversée du désert de quinze ans, Romero revient en pleine forme avec un brûlot horrifique, nerveux et stylisé, presque sans effets numériques mais doté de maquillages et trucages « gore » très réussis. Après avoir dénoncé le racisme, le consumérisme et le bellicisme dans ses précédents films de zombies, Romero ancre Land of the Dead dans le contexte socio-politique des Etats-Unis de l’après 11 septembre 2001 et de la guerre en Irak. Formellement et idéologiquement, Romero se situe aux antipodes du cinéma fantastique américain « mainstream ». Impossible de ne pas penser, devant le spectacle d’un véhicule blindé détruisant tout sur son passage, et des soldats de fortune mitraillant des zombies par écrans de contrôle interposés, aux images des guerres retransmises par les journaux télévisés. Les allusions au problème des sans-abris, au terrorisme, au fossé qui se creuse entre une élite coupée du monde et les couches les plus démunies de la société font de Land of the Dead un film toujours d’actualité près de 20 ans après sa réalisation. Il est même prophétique à bien des égards. Dennis Hopper y incarne un odieux milliardaire tout-puissant qui fait furieusement penser à Donald Trump avant que ce dernier devienne président des Etats-Unis. Trump avait déjà été caricaturé cinq ans plus tôt par Joe Dante dans le satirique Gremlins 2. Land of the Dead ressemble à un baroud d’honneur. Les films suivants de Romero, toujours consacrés aux zombies, sont dispensables.

Land of the Dead était jusqu’à présent inédit en BR en France. Ce combo collector édité par Wild Bunch propose de nombreux suppléments parmi lesquels un commentaire audio de George A. Romero et des interviews réalisés à l’époque de la sortie du film avec les acteurs (Asia Argento, Simon Baker, John Leguizamo) mais aussi des interventions inédites. Très bon livret signé François Cau. Les fans de Romero et les amateurs d’émotions fortes ont aussi droit à des images très sanglantes coupées au montage.

 

Catégories : Actualités

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *