Olivier Père

L’Échine du diable de Guillermo del Toro

En Espagne, pendant la guerre civile, un garçon de douze ans est admis dans un orphelinat perdu en rase campagne. L’établissement, dirigé par une femme infirme et son amant, un vieux professeur, est menacé par les pénuries et le chaos qui règne à ses portes, mais aussi par des dangers internes. L’enfant se retrouve vite en proie à l’hostilité de ses camarades, subit les violences d’un jeune surveillant sadique, et découvre enfin la présence d’un fantôme dans les sous-sols de la résidence. Coproduit par Pedro Almodóvar et son frère Agustín via leur société El Deseo, L’Échine du diable (El espinazo del diablo, 2001) est le troisième long métrage du Mexicain Guillermo del Toro, après Cronos réalisé dans son pays et Mimic réalisé aux Etats-Unis pour Dimension, la f31iliale cinéma de genre de Miramax – une expérience douloureuse mais un film honorable. En 2006, del Toro retournera en Espagne pour mettre en scène Le Labyrinthe de Pan, un autre conte très sombre partageant des thèmes comparables à ceux de L’Échine du diable et le même cadre, la guerre civile, mais avec davantage de moyens et une imagination visuelle plus foisonnante. Ces deux films demeurent encore aujourd’hui ses meilleurs. L’Échine du diable parvient à évoquer les horreurs de la guerre et le martyr de jeunes enfants par le prisme du fantastique. Le film déploie une esthétique à la limite de l’imagerie (travers dans lequel finira par tomber del Toro à Hollywood) mais recèle de beaux moments de cinéma dignes d’une tendance maniériste européenne illustrée par Mario Bava ou Sergio Leone.

L’Échine du diable apparut au moment de sa sortie, avec Les Autres d’Alejandro Amenábar, comme un représentant exemplaire du nouveau cinéma de genre ibérique, entre une tradition latine de fantastique rural et la chronique rétro, parsemé de références au surréalisme et à Bunuel. La rencontre des peurs collectives d’un pays et celle d’un jeune garçon, l’opposition entre l’innocence de l’enfance et la cupidité des hommes, les allusions à l’alchimie donne naissance à une fable allégorique, cruelle et mystérieuse.

Deux belles éditions simple ou Ultra Collector (livre plus coffret) proposées par Carlotta permettent de redécouvrir avec plaisir, dans une version restaurée, ce film qui a très bien vieilli, quoi qu’on pense de la carrière ultérieure de son auteur.

 

Catégories : Actualités

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *