Olivier Père

Gervaise de René Clément

La redécouverte des films de René Clément se poursuit (et se conclut provisoirement) sur ARTE avec la diffusion de Gervaise (1956) lundi 27 juillet à 20h55. Cette adaptation de L’Assommoir par Jean Aurenche et Pierre Bost, spécialistes de la transposition à l’écran des chefs-d’œuvre de la littérature, compte parmi les films à prestige de la production française des années 50. Clément et ses scénaristes restent fidèles à l’esprit de l’œuvre de Zola. Ils édulcorent néanmoins les aspects les plus sombres et cruels du roman, qui s’appesantissait davantage sur la déchéance de son personnage principal et le thème de l’hérédité alcoolique, central dans le cycle des « Rougon-Macquart. » Le film se concentre sur la figure courageuse de Gervaise, femme accablée par le malheur, victime de sa condition sociale mais surtout de la haine, de la perfidie et de la malchance. Clément s’empare du naturalisme littéraire en lui insufflant une certaine dose d’ironie. Son cinéma méticuleux accorde beaucoup d’importance à la scénographie, aux décors et aux mouvements d’ensemble orchestrés avec virtuosité, comme la fameuse scène du lavoir où Gervaise corrige une colporteuse de ragots (la toujours extraordinaire Suzy Delair). L’interprétation dans son ensemble est remarquable. François Périer dans le rôle de Coupeau, le second mari de Gervaise, ouvrier déchu qui sombre dans l’alcoolisme après un accident du travail, réussit une performance d’acteur inoubliable. Maria Schell, grande vedette austro-suisse abonnée aux rôles larmoyants, trouve avec le film de Clément l’occasion d’entamer une carrière internationale qui la mènera de Cinecittà à Hollywood. Le retentissement du film sera considérable au moment de sa sortie. C’est en voyant Gervaise que Luchino Visconti pensera à Maria Schell pour Nuits blanches, et à Suzy Delair pour Rocco et ses frères.

 

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