Olivier Père

Toxic de Michael Herz et Lloyd Kaufman

Estampillé « premier film gore 100% comique » (ou l’inverse ?) lors de sa sortie dans les salles françaises en mai 1985, Toxic (The Toxic Avenger) a lancé la mode de l’horreur parodique, devenue la marque de fabrique de la société de production Troma Entertainment, qui a développé tout un merchandising autour du concept hautement répréhensible mais très lucratif de « nanar volontaire », avec des films ressemblant déjà à des produits dérivés pour fédérer une communauté de fans. Si on peut négliger sans regret la suite des productions Troma, ce premier opus demeure fidèle à sa réputation, et a conservé intact ses valeurs négatives. Humour bête et méchant, excès d’ultra-violence et de vulgarité, irresponsabilité, … Les amateurs du mensuel « Hara-Kiri » et de bandes dessinées trash apprécieront sans doute cette avalanche de mauvais goût filmée en dépit du bon sens, avec des acteurs qui grimacent comme des fous, et des dialogues orduriers. On reste scié par les scènes gore qui dépassent les limites, comme cet enfant écrasé par des chauffards qui prennent des Polaroids des corps ensanglantés de leurs victimes, utilisés ensuite à des fins sexuelles, ou des combats de rue qui ne lésinent pas sur les démembrements, étripages et autres jets d’hémoglobine. Toxic est une parodie des films de super-héros matinée de brûlot anarchisant et de pamphlet écologiste. Nous sommes à Tromaville, la ville la plus polluée et corrompue des Etats-Unis située dans la banlieue de New York. Un gringalet employé à passer la serpillère dans un club de gymnastique fréquenté par une bande de voyous décérébrés est victime d’une plaisanterie cruelle. Déguisé en tutu, il se jette par la fenêtre de désespoir et atterrit dans une cuve de déchets toxiques. Il se métamorphose en colosse difforme au visage à moitié fondu, bien décidé à nettoyer la ville des criminels, mafieux et politiciens véreux qui y règnent en maîtres. Ultime avatar des films de violence urbaine crasseux tournés à New York et ses environs, exploitant la vague d’insécurité essentiellement liée à la drogue qui perdura dans la cité jusqu’au début des années 90, Toxic égrène et tourne en dérision toutes les situations d’agressions décrites par ces films. Les gangs de punks et de junkies qu’affronte le vengeur toxique semblent sortis d’un film de la série « Death Wish » avec Charles Bronson. La voix virile et chaleureuse de Toxic, en totale contradiction avec son apparence physique, est celle d’un justicier masqué d’un sérial des années 40 (c’est sans doute le meilleur gag du film). Michael Herz (à ne pas confondre avec Mikhaël Hers) et Lloyd Kaufman rudoient la grammaire cinématographique et semblent parfois hésiter devant le style du film – le burlesque assumé y côtoie des scènes de violence pas drôles du tout. Moins soigné formellement que Street Trash (euphémisme), moins personnel que les films de Frank Henelotter, Toxic demeure l’un des dignes représentants de l’horreur trash new-yorkaise des années 80, qui allait s’éteindre en même temps que l’assainissement de la ville.

 

Ressortie en salles le mercredi 9 janvier, distribué par Splendor Films.

Disponible à la vente en combo DVD Blu-ray dans un coffret édité par Bach Films, qui regroupe les quatre films de la saga Toxic Avenger.

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