Olivier Père

L’Amour l’après-midi de Eric Rohmer

Le « Summer of Lovers » d’ARTE, avec une programmation spéciale à l’antenne tout l’été, se décline aussi sur la plateforme numérique de la chaîne avec des films disponibles exclusivement – et gratuitement – sur ARTE Cinéma, du 1er juillet au 30 septembre 2018. Parmi eux, un chef-d’œuvre qui propose une image de la séduction bien différente des romances hollywoodiennes.

Sixième et dernier conte moral, L’Amour l’après-midi (1972) est peut-être le plus beau film de la série initiée par Eric Rohmer en 1962 de manière semi-professionnelle, avec La Boulangère de Monceau et La Carrière de Suzanne. Dix ans plus tard, L’Amour l’après-midi est la conclusion et l’accomplissement de ce projet admirable. Dans ces six films, Rohmer entend développer des études de mœurs et de caractères, à la manière d’un écrivain comme Balzac. Un père de famille (Bernard Verley), apparemment heureux en couple, commence à ressentir l’angoisse de la fidélité. Il retrouve une amie de jeunesse (Zouzou, égérie des avant-gardes de la fin des années 60) une jeune femme indépendante, impulsive et aventurière. Il la voit plusieurs fois, un nouveau désir nait en lui et il comprend qu’il est sur le point de céder à la tentation. Comme dans les autres contes moraux, Rohmer s’intéresse aux désordres amoureux et au libre-arbitre. Jusqu’à la conclusion abrupte, le héros trop sûr de ses sentiments est confronté aux limites de sa liberté et à la question du choix. Rohmer situe son film dans les milieux de la petite bourgeoisie intellectuelle parisienne et livre comme à son habitude un instantané juste et précis de son époque, ici le début des années 70 et l’héritage libertaire de Mai 68. L’intelligence du propos, la virtuosité des dialogues, la sensualité de la mise en scène et la beauté de la photographie de Nestor Almendros déclenchent une ivresse vertigineuse.

 

 

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