Olivier Père

Le Cavaleur de Philippe de Broca

ARTE diffuse Le Cavaleur (1979) lundi 2 juillet à 20h55. Le film de Philippe de Broca accompagne la programmation estivale « Summer of Lovers », riche en longs métrages de cinéma, documentaires et concerts.

Le Cavaleur compte parmi les films les plus personnels de Broca, qui met en scène un personnage masculin qui lui ressemble beaucoup. Edouard (Jean Rochefort) est un pianiste virtuose d’une cinquantaine d’années qui ne cesse de fuir la réalité, en perpétuel mouvement et partagé entre ses différentes femmes, épouses et maîtresses, passées, présentes et à venir. Cette instabilité sentimentale ne procure guère de satisfaction à Edouard, qui s’épuise dans une accumulation de mensonges et de déplacements, incapable de jouir du bonheur qui lui apporte sa seconde épouse et leurs enfants. A force de chercher la joie dans l’instant, Edouard prend le risque de tout perdre. Situé dans un contexte beaucoup plus réaliste que L’homme de Rio ou Le Magnifique, Le Cavaleur permet à Broca de questionner le besoin irrépressible de ses personnages masculins de courir à l’aventure et d’écouter leurs envies. Le Cavaleur est une comédie douce-amère qui se déroule dans le milieu de la bourgeoisie française et dresse le portrait d’un homme qui refuse de vieillir, finalement autant étourdi par l’écoulement du temps que par la beauté féminine et les tentations de la chair. On en vient à se demander si Edouard, constamment interrompu par une nouvelle obligation, trouve le temps de consommer ses adultères. Broca signe le scénario avec Michel Audiard, dont les dialogues sont moins comiques et caricaturaux qu’à l’accoutumée. Le scénariste évite les mots d’auteur pour se couler dans l’atmosphère mélancolique du film. Jean Rochefort livre une interprétation subtile, sans jamais sombrer dans le cabotinage survolté qu’aurait pu laisser craindre ce personnage de cavaleur charmeur et désinvolte. Broca, qui s’inspire d’expériences vécues, n’élude pas la lâcheté et la goujaterie de son antihéros, si ses angoisses dissimulées sous son apparente légèreté. Il ne faut preuve d’aucune indulgence vis-à-vis d’un caractère qu’il connaît trop bien. Broca se révèle moins mortifère que son ami François Truffaut qui lui aussi avait évoqué son donjuanisme dans un film très intime, L’homme qui aimait les femmes (1977). Quand Bertrand Morane, double de Truffaut interprété par Charles Denner, entreprenait d’écrire ses mémoires, il choisissait d’abord comme titre « le cavaleur ». Broca s’en souviendra sans doute deux ans plus tard, pour un film qui aurait pu également s’intituler « l’art de la fugue », pour souligner sa musicalité.

 

 

Catégories : Sur ARTE

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *