Olivier Père

Cannes 2018 Jour 8 : Amin de Philippe Faucon (Quinzaine des Réalisateurs)

Après Fatima (réalisé en 2015, son plus grand succès public et critique), Philippe Faucon raconte avec la simplicité qui fait la beauté de son cinéma une nouvelle histoire d’immigration à travers le parcours d’Amin, venu seul du Sénégal pour travailler en France sur des chantiers. Chaque mois, Amin envoie l’essentiel de l’argent qu’il gagne au pays, pour sa femme Aïcha et ses trois enfants. Un jour, à l’occasion de travaux dans sa maison, Amin rencontre Gabrielle, une infirmière séparée de son mari. Une liaison amoureuse nait entre les deux âmes esseulées…

Avec une question de société comme point de départ, la solitude des travailleurs immigrés loin de leurs familles, Philippe Faucon déjoue comme à son habitude les pièges du film à thèse et déploie un récit intimiste et profondément humain où se croise une mosaïque de personnages aussi crédibles qu’émouvants. Amin est le cœur du film mais ses camarades de chantier, eux aussi éprouvés par la solitude, son épouse où ses enfants restés au Sénégal, et tous les autres existent avec force le temps d’une ou plusieurs scènes. La justesse et l’humanisme du cinéma de Faucon ne sont jamais mièvres. La douceur apparente du film dissimule une profonde tristesse, un déracinement et un manque qui blessent au cœur et au corps. Pourtant Faucon ne verse pas non plus dans la mélancolie et le sentimentalisme. Le désir a toujours été le carburant principal de ses films, et Amin ne déroge pas à la règle. Le film déborde de sensualité, et Faucon met en scène les étreintes sexuelles, la beauté des corps offerts avec une simplicité et une évidence rares. il y a une énergie vitale qui traverse ses films, et restitue le courage et la combativité d’êtres blessés par les accidents de la vie et la dureté du monde. Les séquences sénégalaises frappent par leur beauté, et parviennent à nous faire partager le mal du pays ressenti par Amin. Faucon ne s’embarrasse pas de dialogues explicatifs ou de scènes surlignées. Tout est dit au détour d’un plan, d’un mot, ou dans un entre-deux elliptique. Amin est l’un des meilleurs films d’un cinéaste qui tend à l’épure, et affine sa mise en scène pour aller vers toujours plus de grâce et d’émotion.

Amin de Philippe Faucon

Amin de Philippe Faucon

 

Moustapha Mbengue © Bertrand Noël

Moustapha Mbengue, l’interprète d’Amin © Bertrand Noël

Marème N'Diaye, l'interprète d'Aïssa © Bertrand Noël

Marème N’Diaye, l’interprète d’Aïcha © Bertrand Noël

Catégories : Actualités · Coproductions

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