Olivier Père

Baiser macabre de Lamberto Bava

The Ecstasy of Films édite Baiser macabre (Macabro, 1980) de Lamberto Bava pour la première fois en France en combo Blu-ray et DVD dans une version restaurée en haute définition, avec plusieurs entretiens proposés en suppléments. Baiser macabre est un film choc que l’on peut considérer comme le dernier grand film de l’âge d’or du cinéma d’horreur italien, sorte de post-scriptum désespéré à toutes les pulsions violentes et les passions perverses exhibées de manière baroque et opératique par les meilleurs titres du genre.

Avant de se transformer en sympathique artisan du cinéma bis à l’italienne dans sa période hélas terminale, Lamberto fils de Mario Bava débuta sa carrière sous les auspices de son père, maître du gothique transalpin. Il fut d’abord assistant sur ses films – à partir de La Planète des vampires (qui ressort en salles le 8 juillet en version restaurée !) – puis coréalisateur des Démons de la nuit (sans être crédité au générique) et de La Vénus d’Ille (pour la télévision). Les Démons de la nuit (Shock, 1977) est un beau film de vieillesse, qui propose une modernisation des thèmes fantastiques et des effets visuels chers à Mario Bava, avec l’irruption d’une réalité malsaine et problématique (la drogue, le divorce), d’une esthétique plus concrète et triviale. On pourrait y voir l’apport de son fils Lamberto, sans doute soucieux de s’atteler à une forme d’horreur plus contemporaine. Le traitement de l’hystérie féminine dans Les Démons de la nuit annonce en effet le premier film réalisé seul par Lamberto Bava trois ans plus tard, Baiser macabre. Cette incursion monstrueuse dans le cinéma d’horreur, point de non-retour des huis clos morbides du bis transalpin, s’inspire d’un fait-divers nécrophile (ça existe) pour explorer l’esprit dérangé d’une femme qui prolonge au-delà de la mort et de la raison sa liaison avec son amant. On parle quand même d’une femme qui garde une tête en décomposition dans son réfrigérateur afin de se livrer tous les soirs à des ébats sexuels avec ce macabre trophée. Le premier film de Lamberto Bava est placé sous la double influence de son père Mario et de son coscénariste Pupi Avati (La Maison aux fenêtres qui rient). Il serait aussi possible d’évoquer la rencontre entre Joe D’Amato et Roman Polanski au sujet d’un film particulièrement dérangeant, mais plutôt bien mis en scène, qui baigne en pleine putréfaction mentale et physique. Lamberto Bava procède à une surenchère dans l’horreur, la folie et la cruauté. L’atmosphère de La Nouvelle-Orléans, ville qui servira de théâtre à un autre grand film d’horreur moderne, La Féline, est étonnamment rendue à l’écran, jusque dans la bande sonore. Victime de la crise du cinéma italien et du déclin des productions fantastiques, Lamberto Bava ne tiendra pas tout à fait les promesses de ce stupéfiant baiser macabre en orientant sa carrière vers des commandes plus commerciales, qu’il signera souvent John Old Junior, clin d’œil au pseudonyme de son père dans les années 60.

Bernice Stegers dans Baiser macabre

Bernice Stegers dans Baiser macabre

Catégories : Actualités

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