Olivier Père

Cycle Leos Carax sur ARTE

ARTE consacre un cycle Leos Carax (photo en tête de texte sur le tournage de Holy Motors) à l’occasion de la première diffusion en clair de Holy Motors le mercredi 3 septembre à 20h50 (suivi d’un documentaire inédit Leos Carax : Mr. X), avec une soirée spéciale lundi 8 septembre qui permettra de revoir Les Amants du Pont-Neuf à 20h50 suivi de Mauvais Sang en deuxième partie de soirée. Leos Carax est né à Suresnes en 1960. En 1984, à l’âge de 23 ans, il réalise son premier long métrage en noir et blanc Boy Meets Girl (1984) avec Mireille Perrier qui enthousiasme autant le public que la critique et remporte au Festival de Cannes le prix de la jeunesse. Carax est un enfant du cinéma : de la Nouvelle Vague bien sûr, comme le petit frère de Philippe Garrel, mais aussi du cinéma muet (Griffith, Chaplin, Keaton, souligné par l’art de la pantomime de Denis Lavant son acteur fétiche) des mélos d’Abel Gance et des séries B d’auteur de Nicholas Ray.

Deux ans plus tard, il réalise son deuxième film, qui lui aussi est un succès international. Mauvais Sang (1986) avec Juliette Binoche, Michel Piccoli et de nouveau Denis Lavant est en effet récompensé en France par le prix Louis Delluc et obtient le Prix Alfred Bauer à la Berlinale de 1987. Si les apparitions de Boy Meets Girl et Mauvais Sang demeurent les plus probants manifestes esthétiques des années 80, Les Amants du Pont-Neuf (1991) est un rêve de cinéma poétique à l’ambition inégalée. Les Amants du Pont-Neuf est en effet l’une des plus grosses productions de l’histoire du cinéma français, œuvre mythique et superbe histoire d’amour dont le tournage est marqué par de nombreux incidents, problèmes et interruptions et se transforme en gouffre financier qu’une belle réception critique et publique ne parvient pas à estomper. Les Amants du Pont-Neuf avec la muse du cinéaste Juliette Binoche et Denis Lavant est présenté au Forum au Festival de Berlin.

Pola X (1999) d’après Herman Melville, avec Guillaume Depardieu, Katerina Golubeva et Catherine Deneuve témoigne d’une stupéfiante ambition romanesque et visuelle. Jacques Rivette, grand admirateur de Carax, salue le film comme « le plus beau film français des dix dernières années ». Cette œuvre majeure du cinéma contemporain au romantisme noir et moderne, porteuse d’un regard désespéré sur notre civilisation européenne, brassant des questions essentielles (fantômes de la guerre, corruption de l’argent et du pouvoir, souffrance de la création) est hélas mal reçue au Festival de Canne puis sanctionnée par un échec commercial au moment de sa sortie. Après une période d’éloignement du cinéma, Carax participe avec l’épisode Merde à la réalisation du film collectif Tokyo! (2008) aux côtés de Michel Gondry et Bong Joon-ho.

Entre Ubu, Godzilla et Quasimodo, le personnage de Merde donne à Denis Lavant l’occasion d’une extraordinaire performance transformiste (qui annoncent ses identités multiples dans Holy Motors) et permet à Carax qu’il n’a rien perdu de son énergie et de son désir de filmer, d’inventer, d’explorer, de conter. Au contraire. Le romantisme rock et le lyrisme cinéphilique des années 80 se sont transformés en une rage libératrice et punk qui surprend encore dans le paysage du cinéma français et prouve que Carax est toujours un enfant terrible, avec une longueur d’avance sur tout le monde.

L’année 2012 marque son grand retour à la mise en scène avec Holy Motors, toujours avec Denis Lavant entouré d’Edith Scob, Eva Mendes, Michel Piccoli et Kylie Minogue. Le film est l’événement du Festival de Cannes où il est présenté en compétition, fulgurant voyage, déclaration d’amour aux femmes et aux machines, ode à « la beauté du geste » où se mêlent la vie et le cinéma au gré d’émotions et de visions extraordinaires, capable d’embrasser dans un élan généreux les origines du cinéma et son futur incertain.

 

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