Olivier Père

La Dentellière de Claude Goretta

ARTE diffuse ce soir à 22h25 ce très beau film qui avait rencontré un important succès critique et public au moment de sa sortie (il était en sélection officielle au Festival de Cannes) et qui n’a pas pris une ride.

 

Adapté d’un roman de Pascal Lainé, La Dentellière (1977) révéla internationalement la jeune Isabelle Huppert et possède toutes les qualités du cinéma de Claude Goretta, l’un des meilleurs représentants du nouveau cinéma suisse des années 60 et 70 avec Alain Tanner : précision de la mise en scène, sensualité, conscience politique. La timide Pomme s’éveille aux plaisirs de sens grâce à un premier amour, François, rencontré au bord de la mer. Le couple décide de vivre ensemble. Mais Pomme est une petite shampooineuse sans éducation, tandis que François est un étudiant issu de la bourgeoisie intellectuelle. Ils ne sont pas du même monde, il la laisse tomber lâchement. Elle accepte passivement la rupture mais ne s’en remettra pas. Sous sa douceur apparente, La Dentellière est une œuvre violente qui transpose la lutte des classes sur le terrain des sentiments amoureux et démontre ici comme ailleurs leur caractère irréconciliable. Le constat n’est en que plus cruel. Il s’agit du premier rôle principal d’Isabelle Huppert et l’actrice se livre à une interprétation absolument géniale, toujours aussi impressionnante au regard des nombreux autres rôles et performances marquantes qui ont depuis jalonné sa riche carrière. Quelques années plus tard c’est elle qui interprétera une bourgeoise vivant une passion sans avenir avec un jeune prolétaire un peu voyou (Gérard Depardieu) dans Loulou de Maurice Pialat. Un autre grand film.

Avant La Dentellière nous vous conseillons aussi la comédie sociale de Marc Fitoussi Copacabana (2010), diffusée à 20h45, toujours avec Isabelle Huppert épatante dans un registre fantaisiste trop rare dans sa filmographie. Elle y donne la réplique à sa fille Lolita Chammah, très bien elle aussi et qui doit à peu près avoir l’âge de sa mère dans La Dentellière. Un beau portrait de femme et une étude de caractères réussie autour de la relation conflictuelle entre une mère fantasque et une fille plus sérieuse.

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Un commentaire

  1. Bertrand Marchal dit :

    Claude Goretta a fait deux films qui me sont restés en mémoire comme des films forts, pleins d’atmosphère et qui chacun dessine un petit univers original et cohérent – et très sombre. Des films plus denses que la Dentellière, que j’aime moins. Ce sont Si le soleil ne Revenait Pas d’après Ramuz, avec une actrice que j’aime revoir, et qui est très rare au cinéma: Catherine Mouchet. Et surtout l’Invitation; s’il n’avait fait que ce dernier film, il aurait déjà laissé un bel héritage.

    En fait, ce sont les 3 seuls films que j’ai vus de lui. Les cinéastes suisses ne passent pas à la TV et leurs films ne sont pas facilement trouvables. A part Charles, Mort ou Vif…

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