La sortie mercredi prochain en France de Django Unchained de Quentin Tarantino (pas encore vu) nous offre l’occasion de rappeler que le western italien a) n’est pas uniquement représenté par Sergio Leone b) n’est pas seulement le siège de la parodie ou de la vision décadente d’un genre moribond. Tarantino revendique l’héritage du deuxième Sergio, Corbucci (le Django original et d’autres très bons titres) mais comme tous les vrais amoureux du western transalpin il connaît et apprécie aussi le troisième Sergio, Sollima.
Colorado (La resa dei conti, 1966) est l’histoire d’une chasse à l’homme. Un shérif vieillissant (Lee Van Cleef) tenté par la vie politique accepte une dernière mission : poursuivre un paysan mexicain accusé du viol de la fille d’un gros propriétaire. Mais sa proie, rusée et experte dans le lancer du couteau va se révéler extrêmement difficile à capturer.
S’il fallait ne garder qu’un western italien, ce serait sans doute Colorado. Il n’est pas signé Sergio Leone mais Sergio Sollima qui en deux westerns géniaux (Colorado et Le Dernier Face-à-face) s’est affirmé comme l’un des meilleurs cinéastes pas seulement du cinéma bis mais du cinéma italien de l’époque tout court. Colorado est un chef-d’œuvre du western italien qui refuse les facilités de ce sous-genre honni (le sadisme et la rigolade) et offre une subtile fable politique mais aussi un spectacle lyrique. Il n’est pas trop tard pour l’écrire.
L’objectif de Sergio Sollima fut de réaliser des drames humains et des allégories politiques qui n’empruntaient au western européen que son contexte et ses oripeaux les plus superficiels. Les thèmes abordés par Sollima dans Colorado (les pièges de l’identification, la prise de conscience, la lutte des classes, l’héroïsme du tiers-monde) rattachent le film à la mode contemporaine de la fiction de gauche, englobant projets engagés et œuvres de dénonciation plus ou moins commerciales ou opportunistes. Sollima a ainsi déclaré que ses deux personnages antagonistes, le shérif yankee et le péon mexicain, auraient tout aussi bien pu être un parachutiste français et un combattant algérien ou un marine américain et un soldat Viêt-Cong. Heureusement Sollima ne néglige jamais le cinéma au profit du message, et crée un extraordinaire opéra à ciel ouvert, poignant et mouvementé. Le film devient inoubliable grâce à la musique de Morricone et au personnage de Cuchillo, interprété par le génial cabotin Tomas Milian et qui se transforma instantanément en héros du public populaire. Sollima signera d’ailleurs une seconde aventure de Cuchillo, Saludos Hombre (Corri uomo corri, 1968, photo), hélas moins percutante, moins bien écrite et mise en scène que la première, mais toujours avec un Tomas Milian en pleine forme.
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