Olivier Père

Vierges pour le bourreau de Massimo Pupillo

Affiche italienne de Vierges pour le bourreau

Affiche italienne de Vierges pour le bourreau

Artus films est un éditeur de DVD spécialisé dans le fantastique et qui ressort des oubliettes depuis plusieurs années plusieurs pépites du cinéma bis. Du bon travail. La dernière fournée d’Artus est particulièrement exaltante puisqu’elle exhume six titres du cinéma d’épouvante européen. Cinq productions italiennes plus une coproduction germano-helvético-suédoise : Le Château des messes noires (Der Fluch der schwarzen Schwestern, 1973) de Joseph Sarno qu’on a revu avec plaisir après l’avoir découvert au Brady dans les années 90, en compagnie de l’ami Emmanuel Levaufre qui se livre dans les suppléments du disque à une remarquable analyse du film et du travail de Sarno, curieux cinéaste américain spécialisé dans l’érotisme et qui tournera aussi en Europe. On y reviendra peut-être. Les autres films sont d’inégale qualité, allant du routinier (La Crypte du vampire, Le Cimetière des morts-vivants) au génial (L’Effroyable Secret du professeur Hichcock de Riccardo Freda), mais ce sont les deux plus débiles qu’il nous importe d’évoquer ici, et en particulier ce sommet rarement égalé du cinéma idiot qu’est Vierges pour le bourreau. Si vous aimez les acteurs cabotins ou ectoplasmiques, les couleurs criardes et les noirs et blancs blafards, les maquillages granuleux et les effeuillages de starlettes, vous adorerez l’épouvante à l’italienne. À la remorque du trio gagnant du fantastique transalpin (Mario Bava, Riccardo Freda, Antonio Margheriti) proliférèrent dans les années 60 une série de films naïvement inspirés par le folklore gothique : cryptes humides, savants fou, monstres poilus et vampires lubriques sont les ingrédients réguliers de ces bandes mal famées et mal fagotées qui ignorent le juste milieu et les règles élémentaires du bon goût. Mention spéciale à L’Orgie des vampires (Il mostro dell’opera) de Renato Polselli et ses répétitions de music-hall dans un vieux théâtre lyrique hanté par un descendant lointain de Dracula si mes souvenirs sont exacts. Un autre moment fort de la série B (voire Z) italienne nous attend avec Vierges pour le bourreau (Il boia scarlatto, 1965) de Massimo Pupillo (sous le pseudonyme anglo-saxon de Max Hunter) figure au panthéon des amateurs de films bizarres et excessifs. Dans Vierges pour le bourreau Mickey Hargitay, culturiste américain d’origine hongroise marié six ans à Jayne Mansfield et reconverti dans le cinéma de quartier (Les Amours d’Hercule, Lady Frankenstein) tourmente une équipe de photographes et de modèles en tournage dans son château pour mettre en scène des couvertures de romans d’épouvante. Une fille ligotée est tuée par une araignée géante (en mousse), sans logique aucune. C’est le regretté Carlo Rambaldi encore à ses débuts qui se chargea des effets spéciaux, assez risibles. Hargitay campe un aristocrate dégénéré qui se prend pour la réincarnation de son aïeul, un bourreau médiéval réputé pour son sadisme. Il faut le voir gonfler ses muscles, torse nu et coiffé d’une cagoule rouge et hurler à tue-tête en roulant des yeux « sono il boia scarlatto ! » pour effrayer ses victimes suppliciées. Au-delà de la surprenante mise en abîme proposée par le film, retranscription probante à l’écran de l’univers des bandes dessinées pour adultes et des romans-photos sexy, nous goûtons ici aux délices du mauvais cinéma, candide, bariolé, mais sans intentions parodiques et surtout sans complexes.

La version proposée par Artus (doublée en français ou en italien) contient les fameuses scènes de torture absentes des copies françaises car longtemps censurées. On avait pu les découvrir pour les premières fois grâce au « Cinéma de quartier » de Jean-Pierre Dionnet et à la projection du film à la Cinémathèque française le 18 décembre 1998. Pas de quoi fouetter un chat.

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