Le réalisateur français Leos Carax recevra le Pardo d’onore Swisscom lors de la prochaine édition du Festival del film Locarno.
À l’occasion de ce prix, les cinq longs métrages du cinéaste – Boy Meets Girl (1984), Mauvais Sang (1986), Les Amants du Pont-Neuf (1991), Pola X (1999) et Holy Motors (2012) – seront présentés, ainsi que le film collectif Tokyo! dont il a réalisé le segment Merde en 2008. Le public du Festival aura la possibilité d’assister et de participer à une conversation avec le cinéaste.
Leos Carax est né à Suresnes en 1960. En 1984, à l’âge de 23 ans, il réalise son premier long métrage en noir et blanc Boy Meets Girl (1984) qui enthousiasme autant le public que la critique et remporte au Festival de Cannes le prix de la jeunesse. Carax est un enfant du cinéma : de la Nouvelle Vague bien sûr, comme le petit frère de Philippe Garrel, mais aussi du cinéma muet (Griffith, Chaplin, Keaton, souligné par l’art de la pantomime de Denis Lavant) des mélos d’Abel Gance et des séries B d’auteur de Nicholas Ray. Deux ans plus tard, il réalise son deuxième film, qui lui aussi est un succès international. Mauvais Sang (1986) avec Juliette Binoche, Michel Piccoli et son acteur fétiche Denis Lavant est en effet récompensé en France du prix Louis Delluc et obtient le Prix Alfred Bauer à la Berlinale de 1987. Carax réalise ensuite Les Amants du Pont-Neuf (1991), l’un des plus grosses productions de l’histoire du cinéma français, œuvre mythique et superbe histoire d’amour dont le tournage est marqué par de nombreux incidents, problèmes et interruptions et se transforme en gouffre financier qu’une belle réception critique et publique ne parvient pas à estomper. Les Amants du Pont-Neuf avec Juliette Binoche et Denis Lavant est présenté au Forum au Festival de Berlin. Pola X (1999) d’après Herman Melville, avec Guillaume Depardieu, Katerina Golubeva et Catherine Deneuve témoigne d’une stupéfiante ambition romanesque et visuelle. Jacques Rivette (le précédent Léopard d’honneur français à Locarno), grand admirateur de Carax, salue le film comme « le plus beau film français des dix dernières années ». Cette œuvre majeure du cinéma contemporain au romantisme noir et moderne, porteuse d’un regard désespéré sur notre civilisation européenne, brassant des questions essentielles (fantômes de la guerre, corruption de l’argent et du pouvoir, souffrance de la création) est hélas mal reçue au Festival de Canne puis sanctionnée par un échec commercial au moment de sa sortie. Après une période d’éloignement du cinéma, Carax participe avec l’épisode Merde à la réalisation du film collectif Tokyo! (2008) aux côtés de Michel Gondry et Bong Joon-ho.
Entre Ubu, Godzilla et Quasimodo, le personnage de Merde donne à Denis Lavant l’occasion d’une extraordinaire performance transformiste (qui annoncent celles de Holy Motors) et permet à Carax qu’il n’a rien perdu de son énergie et de son désir de filmer, d’inventer, d’explorer, de conter.
Au contraire. Le romantisme rock et le lyrisme cinéphilique des années 80 se sont transformés en une rage libératrice et punk qui surprend encore dans le paysage du cinéma français et prouve que Carax est toujours un enfant terrible, avec une longueur d’avance sur tout le monde.
L’année 2012 marque son grand retour à la mise en scène avec Holy Motors (2012), toujours avec Denis Lavant entouré d’Edith Scob, Eva Mendes et Kylie Minogue. Le film est l’événement du Festival de Cannes où il est présenté en compétition.
Je suis très ému et honoré d’inviter à Locarno l’un des plus grands créateurs du cinéma mondial. Les apparitions Boy Meets Girl et Mauvais Sang demeurent les plus probants manifestes esthétiques des années 80, Les Amants du Pont-Neuf un rêve de cinéma poétique à l’ambition inégalée tandis que Pola X, d’une beauté, d’une sincérité et d’une ampleur bouleversantes, est pour nous le chef-d’œuvre de Leos Carax. Quant à Holy Motors c’est déjà l’un des meilleurs films de l’année, fulgurant voyage, déclaration d’amour aux femmes et aux machines, ode à « la beauté du geste » où se mêlent la vie et le cinéma au gré d’émotions et de visions extraordinaires, capable d’embrasser dans un élan généreux les origines du cinéma et son futur incertain.
Le Pardo d’onore du Festival del film Locarno est attribué depuis 24 ans à un maître du cinéma contemporain et compte parmi ses lauréats des cinéastes de l’envergure de Manoel de Oliveira, Bernardo Bertolucci, Jean-Luc Godard, Abbas Kiarostami, Aleksandr Sokurov, Hou Hsiao-hsien, William Friedkin, Alain Tanner, Jia Zhangke et, en 2011, Abel Ferrara.
Swisscom, sponsor principal du Festival del film Locarno depuis 1998, soutient le Pardo d’onore pour la quatrième année consécutive.
La 65e édition du Festival del film Locarno se déroulera du 1er au 11 août 2012.
Lire sur mon blog le texte sur Holy Motors paru au moment du Festival de Cannes http://olivierpere.wordpress.com/2012/05/24/cannes-2012-day-9-holy-motors-de-leos-carax-selection-officielle-en-competition/
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