Mario Bava, réalisateur spécialisé dans le cinéma fantastique longtemps méconnu du grand public et méprisé par la critique, est aujourd’hui considéré à juste titre comme l’un des plus grands cinéastes italiens modernes. Danger, Diabolik! (Diabolik, 1968) est à la fois son film le plus commercial (il s’agit d’une production Dino De Laurentiis au budget confortable, avec une distribution internationale et une extraordinaire bande originale d’Ennio Morricone) et une de ses plus grandes réussites, véritable manifeste esthétique d’un artiste obsédé par les simulacres et les métamorphoses de l’image, et proposition vraiment géniale d’un hypothétique pop art cinématographique. D’abord grand chef opérateur, spécialiste de la couleur et des effets spéciaux visuels, Bava n’a jamais eu comme acteurs que des mannequins déshumanisés et pour sujet la pulsion sadique et sexuelle. Le cinéma d’épouvante fut pour lui le terrain de jeux idéal pour expérimenter ses inventions photographiques et donner libre cours à sa misanthropie et son humour noir. Danger, Diabolik!, inspiré des « fumetti » des sœurs Giussiani extrêmement populaires en Italie, adapte à l’écran les exploits d’un super criminel, sorte de Fantomas futuriste qui vole et tue sans autres motifs que de ridiculiser la police et assouvir les luxueux caprices de sa fiancée Eva Kant. Film libertaire et déluré, saturé de symboles sexuels, Danger, Diabolik! demeure le modèle jamais dépassé d’une transposition de bande dessinée au cinéma, qui offre à Bava l’opportunité rêvée de créer un univers volontairement irréel et artificiel, où tout est faux (y compris le couple vedette), sauf peut-être le talent des seconds rôles, interprétés par d’excellents comédiens dans un état euphorique, Michel Piccoli en tête. Si Phantom of the Paradise est pour nous le film fétiche des années 70, Diabolik est sans conteste celui des années 60. On y reviendra.
Danger, Diabolik! de Mario Bava
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