Olivier Père

Les Deux Anglaises et le continent de François Truffaut

Au début du siècle dernier, Claude, un jeune bourgeois français se lie d’amitié avec deux sœurs galloises, Anne et Muriel. Il demande la main de cette dernière. Après quelques mois de séparation et au grand soulagement de sa mère, Claude reprend son indépendance, devient critique d’art, multiplie les conquêtes. Il retrouve un jour Anne, dont il deviendra l’amant, tandis que Muriel se réfugie dans le mysticisme… « Ce n’est pas un film d’amour physique, mais un film physique sur l’amour » explique Truffaut au moment de la sortie des Deux Anglaises et le continent, réalisées en 1971 après un grave dépression. Truffaut malmène en effet sa pudeur naturelle et ose affronter des thèmes et des images délicates à filmer, comme l’évocation de l’onanisme de Muriel ou la tache de sang virginal qui envahit l’écran (« il y avait du rouge sur son or »). Si aimer est une joie et une souffrance, le film ne retient que la souffrance. Adaptées d’un roman de Henri-Pierre Roché, comme Jules et Jim, Les Deux Anglaises et le continent appartiennent à la veine intimiste et douloureuse de l’œuvre de François Truffaut, nourrie de ses propres expériences, où le cinéaste s’intéresse à la passion amoureuse, à ses ravages et ses ratages. « La vie est faite de morceaux qui ne se joignent pas », déclare Muriel. Le cinéaste tranche dans l’épaisseur romanesque du sujet pour en extraire différentes époques, faites de retrouvailles et d’éloignement, d’étreintes et de ruptures, de correspondances et de silences. Bouleversant. Le film maudit – et sans doute le chef-d’œuvre – de François Truffaut, mutilé lors de sa première distribution, dont la version intégrale de 130 minutes ne fut restaurée que beaucoup plus tard.

Catégories : Uncategorized

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *