ARTE ReportageSalvador / Afrique du Sud

Salvador : un modèle qui dérange
Le 15 mars dernier, le président américain Donald Trump ordonnait la déportation de 238 prisonniers vénézuéliens au Salvador, dans une prison de haute sécurité. La décision a été contestée par un juge fédéral, mais les avions avaient déjà décollé. "Trop tard", a ironiquement commenté le président salvadorien. Ces prisonniers ont rejoint le Cecot, considéré comme l’une des plus grandes et des plus sûres prisons du monde. Elle a été construite sur ordre du président Nayib Bukele en 2022, pour enfermer à vie les membres des "maras", les gangs meurtriers qui ravageaient le Salvador depuis les années 1990. Très peu de journalistes ont pu entrer dans cette prison. Lucas Menget a obtenu une visite, sous contrôle des autorités, dans l’un de ses bâtiments. Les détenus y sont maintenus, à vie, sous un régime pénitentiaire d’une rudesse extrême, sans aucune possibilité de sortie à l’air libre, sans contact avec l’extérieur, et souvent sans procès. Ce système, vanté par Donald Trump, est dénoncé par de nombreux pays et organisations des droits humains. Il s’accompagne d’un état d’urgence dans tout le pays, appelé "régime d’exception", qui permet à la police et à l’armée d’arrêter sur simple doute, dénonciation, ou parfois tatouage (marqueur dans certains cas de l’appartenance aux gangs). Ce reportage nous conduit dans la prison du "Cecot", mais aussi dans une prison de droit commun, une parmi la vingtaine que compte le pays. Le Salvador a le plus fort taux d’incarcération au monde, avec 2% de la population en prison. L’équipe est aussi allée à la rencontre d’un innocent, libéré après des mois de détention et de torture. Il témoigne à visage couvert, mais son récit est glaçant. Chaque jour, les Salvadoriens tentent, difficilement, de faire valoir leurs droits, dans un pays où la sécurité prévaut désormais totalement sur l’État de droit. 

Afrique du Sud : la revanche de Musk
L’Afrique du Sud est victime d’une campagne d’acharnement de Washington. Comme les autres pays du Sud global, elle souffre de la fermeture de l’USaid, l’agence de développement américaine, décidée par Elon Musk pour faire des économies. Mais en plus, les Etats-Unis ont expulsé l’ambassadeur sud-africain et menacent de se retirer des accords de libre-échange. Derrière ces décisions, il y a des tensions politiques mais également l’influence d’Elon Musk. Le milliardaire, né en Afrique du Sud, quitte le pays à l'âge de 17 ans. Et depuis plusieurs années, l’homme d’affaires se rapproche des milieux suprémacistes blancs, dont il reprend les discours sur son réseau social X, jusqu’à évoquer l’existence d’un "génocide blanc". À Johannesburg nous avons rencontré les Sud-Africains les plus pauvres, victimes des coupes de budget américaines. Dans ce pays qui compte le plus grand nombre de séropositifs au monde – 7,7 millions de personnes, soit un adulte sur cinq –, tout le secteur est perturbé par l’arrêt d’USaid : le suivi des traitements, la recherche, les centres de soins…. Les professionnels craignent une résurgence de l’épidémie. À Pretoria, nous avons donné la parole aux Afrikaners, les descendants des premiers colons hollandais et français. Depuis la fin du régime d’apartheid en 1994, ils se plaignent d’être victimes de discriminations dans leur pays. Fin janvier, le gouvernement sud-africain a adopté une loi dite d’expulsion, qui a provoqué la colère de Donald Trump. En réaction, l’hôte de la Maison Blanche a offert le statut de réfugiés aux États-Unis aux Afrikaners.