ARTE Regards

Une fois en mer, Mestre Eduino Quadros ignore quand il retrouvera son port d’attache. En pleine saison, les pêcheurs suivent les bancs de thons. Une méthode absolument durable, dont le marin n’est pas peu fier alors qu’il arbore sa canne à pêche en bambou. Car il le sait bien : l’extinction des ressources halieutiques n’est pas le fait des marins-pêcheurs traditionnels comme lui. Le thon fait vivre sa famille depuis des générations. Mais la pêche traditionnelle apporte désormais son lot d’incertitudes. Parfois, un seul banc de poissons lui permet de tenir un mois entier. Mais il arrive aussi que deux à trois semaines s’écoulent sans la moindre prise.

À bord, quinze hommes remontent à la force du poignet des spécimens de 60 à 80 kilos pêchés à la ligne. Eduino doit bien sûr payer son équipage et gérer la hausse du prix du fioul. Mais ce qui l’inquiète le plus, ce sont les directives européennes qui interdisent actuellement la capture de poissons de moins de dix kilos. Les restrictions sont de plus en plus drastiques. De quoi susciter l’indignation d’Eduino qui déplore l’impunité dont bénéficie la pêche industrielle avec ses chaluts décimant les mers du globe. Le pêcheur des Açores aimerait bien que les géants du secteur soient eux aussi soumis à des contrôles.

Et puis il y a les quotas de pêche de l’Union européenne. Si les taux admissibles de captures sont atteints pour une espèce, Eduino et ses collègues n’ont plus le droit d’attraper aucun poisson et ne gagnent donc pas le moindre sou. C’est peu dire qu’il est préoccupé par l’avenir de la pêche "manuelle". Et ce d’autant plus que les jeunes de l’archipel sont de moins en moins disposés à embrasser une profession aussi contraignante.