Olivier Père

Dernière Séance de Laurent Achard

(english version)

Dernière Séance sort aujourd’hui sur les écrans français, distribué par Epicentre. Il fut présenté en première mondiale lors du 64ème Festival del film Locarno – Concorso internazionale. Il vient de gagner le prix du meilleur film français au Festival « Entrevues » de Belfort.
Sylvain, jeune homme solitaire et taciturne, est projectionniste dans un vieux cinéma de quartier. La salle va bientôt fermer, faute de spectateurs, mais Sylvain ferme les yeux devant la réalité et continue de projeter inlassablement le même film, French Cancan de Jean Renoir (un hymne à la vie et à la sensualité), devant une poignée de cinéphiles habitués de la salle. Sylvain a une autre obsession que le cinéma : la nuit il assassine des femme selon un rituel macabre, hanté par le souvenir traumatique de sa mère.
Dernière Séance
, troisième long métrage du cinéaste français Laurent Achard, marque son retour au cinéma après Le Dernier des fous (2006, Pardo de la mise en scène à Locarno), déjà interprété par son acteur fétiche, Pascal Cervo (magnifique dans le rôle de Sylvain.)
Laurent Achard est un cinéaste passionnant et atypique, à l’image de son nouveau film Dernière Séance. Cinéphile, autodidacte, aussi rare que précieux, il s’inscrit dans une certaine famille du cinéma français, la plus belle, celle des solitaires, des irréductibles et des francs-tireurs, des cinéastes pour qui le cinéma est un art populaire et qui s’adressent donc à « l’immense minorité » : Vecchiali, Brisseau, Achard… qui d’autre désormais ? Dernière Séance s’inscrit dans un projet de collection visant à commander à des cinéastes français des films de genre à petit budget, sur le modèle lointain des séries B. Dans ce cas précis, nous sommes plus proches de Bresson que des tristes imitations des récents succès américains. Dernière Séance est peut-être un film de genre, mais comme peuvent l’être Psychose (Sylvain est un cousin de Norman Bates) ou Shining, c’est-à-dire transcendé par une idée plus forte que les ingrédients habituels du film d’horreur ou du thriller, et qui existe aussi bien en France dans le présent qu’à Hollywood dans le passé : celle de la mise en scène. Achard, engoncé dans les habits trop étroits du cinéma d’auteur tricolore, forcément intimiste et personnel, se rêve grâce à sa productrice Sylvie Pialat en cinéaste de studio, au service d’un genre ou d’un scénario. Achard est un brillant stylise, et son film une déclaration d’amour au cinéma qui, loin d’être mort – malgré la dimension extrêmement morbide de Dernière Séance – bouge, émeut et fascine encore. A ne rater son aucun prétexte, Dernière Séance s’impose selon nous comme l’un des meilleurs et plus saisissants films français de l’année. Il ne devrait pas tarder à circuler comme un mot de passe parmi les cinéphiles et les passionnés de cinéma.

 

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