Olivier Père

Variety de Bette Gordon

Variety demeure l’un des meilleurs représentants de la « no wave » new-yorkaise des années 80, aux côtés des premiers films de Jim Jarmusch. L’histoire d’une jeune femme, ouvreuse d’un cinéma porno dans l’univers des peep-shows et des salles X dissimule un hommage au film noir. Bette Gordon choisit de confier à son personnage féminin le rôle moteur de la voyeuse, obsédée par un client énigmatique qui pourrait bien être un gangster. La réalisatrice s’inspire à la fois des films new-yorkais des années 50 de Fuller ou Dassin et du cinéma moderne européen. Son héroïne, confrontée au monde très masculin de la pornographie, explore son propre désir, sans aucun jugement moralisateur. Bette Gordon procède à une inversion des rôles puisque c’est la femme qui entreprend une enquête à la manière d’un détective, tandis que l’homme devient objet de mystère et de fascination. Du point de vue de la mise en scène, on pense moins à Taxi Driver, malgré la similitude de certains lieux de tournage, qu’à Rivette ou Antonioni. Le choix de la non-résolution finale, d’une conclusion abandonnée au vide et à l’absence inscrit Variety dans un héritage moderniste. Le film affiche également sa proximité avec le travail photographique de Nan Goldin, qui tient un petit rôle de barmaid. Variety se révèle un fascinant portrait de femme doublé d’un tableau des quartiers louches de New York, avec une appréhension féministe d’un sujet qui ne sombre jamais dans le sordide malgré le contexte.

Le film avait été repéré à la Quinzaine des réalisateurs en 1984, avant de sombrer dans l’oubli. Il réapparait enfin dans une belle version restaurée et c’est une excellente nouvelle.

 

Après sa distribution en salle l’année dernière, Les Films du Camélia proposent Variety dans un combo DVD/Blu-ray soigné, avec des entretiens exclusifs avec Bette Gordon et Nan Goldin, et une présentation du film par Joseph Goshn. Le coffret contient un excellent accompagnement éditorial du film : Un livret style dossier de presse avec des textes de Bette Gordon, une présentation de Nan Goldin et de l’actrice principale Sandy McLeod, des photos et des extraits du storyboard.

Catégories : Actualités

Un commentaire

  1. Marie E. dit :

    Dans ce film Variety que j’ai vu et revu, c’est vrai que j’ai été fascinée par cette inversion des rôles dans ce monde du porno dirigé par les Hommes. L’héroïne du film , devient un peu par hasard ouvreuse dans un cinéma porno….Et là elle se découvre une curiosité intérieure ,mais aussi pragmatique, saine de ce monde du porno géré par et pour les hommes! Elle explore ses propres désirs et c’est fascinant, je me suis pas mal retrouvée dans cette approche très personnelle et osons le dire sensuelle de cette Femme! Bette Gordon a fait un portrait très abouti de son héroïne, libérée , déterminée, attachante, aimante et aimée , fascinée par ce monde du porno….A voir, à revoir

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