Olivier Père

La Chambre verte de François Truffaut

Dans le cadre de son cycle Nathalie Baye, ARTE diffuse en version restaurée La Chambre verte (1978) mercredi 16 juin à 23h50.

La Chambre verte compte parmi les films les plus intimes et secrets de François Truffaut, au point que ce dernier, incapable d’en déléguer le rôle principal à un acteur, interprétera lui-même Julien Davenne, personnage pathétique qui bascule dans la folie. Le cinéaste s’inspire de trois nouvelles de Henry James, auxquelles il emprunte les arguments ou certaines situations : L’Autel des morts, La Bête dans la jungle et Les Amis des amis. Cette source littéraire débouche sur un film qui s’apparente à une confession impudique. La Chambre verte demeure l’expression la plus radicale de la passion selon Truffaut : une passion solitaire, fiévreuse, malheureuse. Davenne, revenu indemne de la Grande Guerre mais traumatisé par les charniers des tranchées, voue un culte non pas à la mort mais aux morts, ses morts qu’il a connus et aimés, et en particulier son épouse Julie, prématurément décédée. Il décide de leur consacrer une chapelle dans un cimetière, qu’il restaure avec l’autorisation de l’Église et décore de nombreuses photographies. Chaque disparu est symbolisé par la flamme d’une bougie. L’ensemble forme une figure qui ne sera complétée qu’à la mort de Davenne. Le seul contact ténu qui le retient dans le monde des vivants est une jeune femme, Cecilia (lumineuse Nathalie Baye) qui elle aussi a choisi de ne pas oublier les morts, porte le deuil de son amant adoré, mais ne se laisse pas entraîner par les penchants morbides et autodestructeurs de Davenne. Jamais Truffaut n’est allé aussi loin dans la description d’un cas monomaniaque, dévoré par son obsession. La Chambre verte entretient des points communs avec L’Enfant sauvage et L’Homme qui aimait les femmes, mais se révèle beaucoup plus désespéré. Sublimé par la photographie clair-obscur du génial chef-opérateur Néstor Almendros, La Chambre verte est le grand film malade de Truffaut, et l’un des sommets maudits de son œuvre.

 

Vous pouvez retrouver sur ARTE.tv une conversation filmée inédite avec Nathalie Baye, où l’actrice évoque avec nous les quatre films du cycle qui lui est consacré sur l’antenne d’ARTE : La Chambre verte, La Fleur du mal, Le Petit Lieutenant, Juste la fin du monde.

 

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3 commentaires

  1. Aliocha dit :

    Film sublime !! Bon, vous avez raison vraiment « radical » (d’ailleurs le film a fait un bide atroce en salles à l’époque), mais bouleversant, et Truffaut là-dedans est génial, si fragile, et si émouvant… La fin me déchire le coeur à chaque vision… Au fait, j’ai lu que Delon admirait tellement ce film qu’il avait écrit à Truffaut pour le lui dire et aussi qu’il aurait rêvé d’être choisi pour en jouer le rôle principal… (par contre, mais pourquoi le passer si tard ??? C’est quand même pas non plus un « midnight movie », malgré sa radicalité !! Y a quoi, avant le même soir pour justifier ça ???)

    • Olivier Père dit :

      Je sais je le déplore aussi mais ce n’est pas moi qui programme les films… au départ nous l’avions acheté pour une deuxième partie de soirée.

  2. Aliocha dit :

    Ah OK no problemo, merci pour votre réponse en tout cas ! 😉

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