Olivier Père

La Femme infidèle de Claude Chabrol

En hommage à Stéphane Audran, disparue le 27 mars à l’âge de 85 ans, ARTE bouleverse ses programmes et diffuse mercredi 28 mars deux des films les plus importants de l’actrice française : La Femme infidèle (1968) de Claude Chabrol à 20h55 et Le Festin de Babette (1987) de Gabriel Axel à 22h30. La Femme infidèle sera également disponible en télévision de rattrapage jusqu’au 5 avril sur le site d’ARTE.

La Femme infidèle est un titre exemplaire dans la filmographie de Chabrol. Il a été réalisé durant une période vaste, celle qui unit le cinéaste au producteur André Génovès entre 1967 et 1975 et va donner naissance à plusieurs des meilleurs films de Chabrol : Que la bête meure, Le Boucher, Juste avant la nuit… presque tous interprétés par Stéphane Audran. La Femme infidèle est peut-être le plus parfait de tous car il expose de manière limpide le projet de Chabrol, développé dans les films suivants. Il s’agit de partir de l’étude des mœurs de la bourgeoisie provinciale française pour aboutir à une réflexion vertigineuse sur les pulsions criminelles et la folie longtemps refoulées de personnages prisonniers des apparences et des rituels de leur milieu social. Michel Bouquet a incarné à la perfection cet homme ordinaire au bord de la rupture, tandis que Stéphane Audran, muse de Chabrol, a inventé un personnage de femme à la fois fatale et quotidienne, épouse placide et énigme indéchiffrable. Stéphane Audran conserve son mystère. Le couple formé par les deux acteurs sera réuni par Chabrol quelques années plus tard dans un autre film génial, Juste avant la nuit, nouvelle histoire de meurtre et de trahison. La Femme infidèle met en scène l’adultère de manière clinique. Rien dans le regard de Chabrol ne cherche à expliquer ou dénoncer quoi que ce soit, du moins explicitement. Il enregistre des comportements machinaux et des conversations sans affect. Lorsqu’un mari bourgeois découvre que sa femme le trompe et tue l’amant de cette dernière, dans un geste incontrôlé, Chabrol enregistre le dérèglement progressif d’une existence bien rangée. Son film bascule subtilement dans une ambiance cauchemardesque. La Femme infidèle dévoile la dimension fantastique du cinéma de Chabrol.

 

 

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