Olivier Père

Bob le flambeur de Jean-Pierre Melville

ARTE diffuse Bob le flambeur (1956) de Jean-Pierre Melville lundi 26 février à 22h20, en version restaurée.
« Un vieux jeune homme, figure déjà légendaire d’un passé récent », « une belle gueule de voyou ». C’est ainsi que nous est présenté Bob le flambeur, d’abord par le commentaire moitié ironique, moitié nostalgique qui ouvre le film (dit par Jean-Pierre Melville), puis par cette réflexion de Bob lui-même (Roger Duchesne, un ancien acteur des années 30, tombé en déchéance en raison de son attitude pendant l’Occupation) apercevant au petit matin le reflet de son visage défait, au sortir d’une longue partie de cartes, Place Pigalle. Bob le flambeur est le premier scénario original de Melville, nourri de son amour du cinéma américain, mais aussi de sa vie de noctambule et de ses mauvaises fréquentations. Le cinéaste s’identifie à son héros vieillissant, joueur invétéré qui arpente le Montmartre de l’après-guerre comme un seigneur en ses terres, admiré par ses pairs, respecté par la police, gardien de la morale du Milieu, en voie de disparition. Bob est le premier bandit dandy de la filmographie de Melville. Il y en aura beaucoup d’autres, mais jamais d’aussi nobles. Pourtant Bob le flambeur n’est pas encore à strictement parlé un polar, même s’il contient une légendaire scène de braquage du casino de Deauville. Il faudra attendre Le Doulos pour que Melville invente une nouvelle forme de film noir à la française. Le cinéaste définissait Bob le flambeur comme une étude de mœurs. Tourné sans beaucoup argent, avec de nombreux plans filmés dans la rue, Bob le flambeur annonce la Nouvelle Vague et plus particulièrement A bout de souffle. Il contient également le portrait étonnant d’une jeune fille amorale qui passe de lit en lit avec un flegme et une indifférence inhabituelles dans un film de l’époque. Isabelle Corey, 15 ans et demi au moment du tournage, découverte dans la rue par Melville, offre sa morgue de débutante au cinéaste amateur de femmes et amoureux des hommes. Elle possède sans doute le premier corps et le premier phrasé modernes du cinéma français, la même année que la sortie de Et Dieu… créa la femme.

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