Olivier Père

Le Parrain de Francis Ford Coppola

ARTE diffuse Le Parrain (The Godfather, 1972) dimanche 22 janvier à 20h45. Les deux autres parties de la trilogie de Francis Ford Coppola vous seront proposées les dimanches suivants.

Le Parrain est un chef-d’œuvre absolu et aussi une date importante dans l’histoire du cinéma. Avec quelques autres titres (Les Dents de la mer, L’Exorciste) il ouvre l’ère des « blockbusters » hollywoodiens qui, au début des années 70, étaient encore confiés à des jeunes cinéastes peu expérimentés mais surdoués, embarqués sur des projets audacieux. Le Parrain va non seulement pulvériser des records de recettes et connaître un succès mondial sans précédent, mais aussi révéler l’immense talent de Coppola, déjà consacré comme scénariste (un oscar pour Patton en 1971) mais dont les premiers films, inégaux, n’avaient connu qu’une audience réduite. Tout a déjà été dit sur Le Parrain, sa genèse tumultueuse et son tournage houleux, constamment au bord du désastre pour le jeune réalisateur, et sa réussite éblouissante. Il fallait du génie et une bonne dose de courage à Coppola pour transformer l’adaptation d’un best seller sur la mafia produit par l’étrange Robert Evans alors à la tête de la Paramount en tragédie funèbre, et imposer ses moindres choix esthétiques de l’écriture au montage, dans un contexte hostile. Coppola devra se battre pour convaincre le studio de la pertinence de ses choix pour la distribution, notamment Marlon Brando alors en totale disgrâce à Hollywood et un débutant nommé Al Pacino. On connaît la suite. Le Parrain, véritable saga familiale aux proportions shakespeariennes, est avant tout une métaphore du capitalisme américain. Coppola s’intéresse moins au folklore du film de gangsters qu’à la description d’un système de réseaux, d’alliances et de trahisons, où triomphe la loi du plus puissant et du meilleur stratège, dans des batailles, des débats et des assassinats qui renvoient à la Rome antique. Le Parrain est aussi la première – et l’une des plus brillantes – démonstration de l’art transformiste de Coppola, capable de réinventer sa mise en scène selon les sujets qu’il traite, puisant son inspiration dans l’histoire du cinéma et dans sa culture encyclopédique. Ainsi Le Parrain, par son ampleur opératique, la subtilité de sa direction d’acteurs, la richesse de son propos, se nourrit du cinéma des maîtres Kazan, Visconti et Kurosawa. Coppola accouche d’une création magistrale, qui sera suivie par deux autres volets peut-être moins parfaits mais tout aussi passionnants.

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