Olivier Père

Cannes 2016 Jour 6 : Train to Busan de Yeon Sang-ho (Hors compétition, séance de minuit)

Chaque année le Festival de Cannes nous régale de films de genre, généralement asiatiques et présentés hors compétition en séance de minuit. La 69ème édition ne déroge pas à cette règle avec au moins deux films riches en émotions fortes. Le première par ordre de projection n’est rien d’autre qu’une réponse coréenne à la mode des films « d’infectés », avatars postmodernes des films de zombies inventés par George A. Romero en 1968 (La Nuit des morts-vivants) et déclinés depuis sous toutes les formes inimaginables. En 2002 le pourtant peu inspiré – il a d’ailleurs tout pompé sur une série B italienne des années 80, Démons – Danny Boyle a revivifié avec 28 Jours plus tard le sous-genre zombiesque avec la figure de l’infecté monté sur ressort et galopant comme un dératé, généralement en horde, pour grignoter ses victimes avec moult grognement, à la différence des macchabés léthargiques auxquels nous avaient habitués Romero, Fulci et compagnie. Formule survoltée que reprendra Zack Snyder dans L’Aube des morts. L’infecté est beaucoup plus dangereux que le zombie à l’ancienne car il court vite et vous contamine en quelques minutes. Fort heureusement il est souvent bête comme ses pieds, à l’instar des créatures de Train to Busan incapables d’actionner la poignée d’une porte vitrée ou de s’intéresser à une proie potentielle si elle se trouve hors de leur champ de vision.

Train to Busan

Train to Busan

 

Train to Busan raconte la propagation monstrueuse d’un virus zombie sur un train à haute vitesse en direction de Busan. Avant que les choses sérieuses ne commencent la présentation du groupe de passagers comprenant des caractères bien typés – deux vieilles dames, un grand patron irascible, une équipe de base-ball, un clochard nous renvoie au bon souvenir de la série Airport ou de tout autre film catastrophe des années 70 se déroulant dans un moyen de transport – Le Pont de Cassandra par exemple, avec son train – déjà – transportant le virus de la peste. La suite relève de l’action non stop, avec l’élimination progressive des passagers et la lutte pour la survie d’un petit groupe de rescapés, réfugiés dans un wagon puis dans un autre train. Le cinéaste connaît ses classiques et réussit à nous surprendre malgré les nombreuses citations d’autres films, de Runaway Train à World War Z. Train to Busan permet de savourer la différence entre un blockbuster coréen et un blockbuster hollywoodien. Le pays du matin calme sait confectionner des superproductions qui sauvent leur âme, conservent les qualités dynamiques des séries B, avec des acteurs formidables et une attention constante aux personnages, sans parler des annotations sociopolitiques qui mettent souvent ces films en prise directe avec la réalité du pays. C’est le cas de Train to Busan, dont le héros est un « trader » qui néglige sa fille à cause de son travail et va enfin pouvoir lui exprimer son amour dans des conditions dramatiques.

Avant Train to Busan Yeon Sang-ho était connu pour avoir réalisé plusieurs longs métrages d’animation pour adultes à caractère social et satirique. Son passage au cinéma traditionnel porte la marque de sa formation d’animateur. Au lieu du sur découpage frénétique et informe de la plupart des blockbusters actuels Train du Busan se signale par la précision de ses cadres et la lisibilité de sa mise en scène, qui évoquent la bande dessinée et l’animation.

Train to Busan est d’ailleurs le prolongement du précédent film d’animation de Yeon Sang-ho, tourné juste avant, Seoul Station, sur une invasion de zombies dans le métro de la capitale coréenne, qui devrait finalement sortir après Train to Busan : un excellent double programme en perspective !

Mehmet Can Mertoğlu © Bertrand Noël

Yeon Sang-ho © Bertrand Noël

 

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