Olivier Père

L’Ange ivre de Akira Kurosawa

Conjointement à la ressortie en salles le 9 mars par Carlotta de neuf films de Akira Kurosawa produits par la Toho, Wild Side a édité le 2 mars deux autres classiques du cinéaste japonais également réalisés pour le célèbre studio, dans des superbes combos Blu-ray + DVD accompagnés de livrets critiques : L’Ange ivre et Chien enragé, disponibles pour première fois en versions restaurées HD.

L’Ange ivre (Yoidore tenshi, 1948) est le huitième long métrage de Akira Kurosawa, mais, du propre aveu du cinéaste, il s’agit de sa première œuvre vraiment personnelle. Kurosawa réunit à l’occasion de cette production Toho quelques-uns de ses collaborateurs techniques et artistiques essentiels, avec lesquels il tournera ensuite une longue série de chefs-d’œuvre. Parmi eux, et non des moindres, le jeune Toshiro Mifune, aux côtés de Takashi Shimura qui avait déjà joué dans les deux premiers films de Kurosawa cinq ans auparavant. Le style et la mise en scène du cinéaste s’épanouissent et témoignent d’une maîtrise impressionnante de l’espace, des décors et des mouvements de caméra. Kurosawa est à l’époque sous l’influence croisée du néo-réalisme italien et du réalisme poétique français, mais aussi de l’expressionnisme comme en témoignent certains jeux d’ombres et l’interprétation parfois outrée de ses comédiens (Mifune en particulier), sans oublier bien sûr Dostoïevski. Mais ici, c’est surtout l’ambition du propos qui impressionne. Kurosawa décide d’observer le désarroi moral du Japon d’après-guerre en filmant les bidonvilles, et toute une population d’exclus, de hors-la-loi et de marginaux. La reconstitution minutieuse des bas-fonds de Tokyo est le théâtre de l’affrontement entre un médecin alcoolique qui se consacre aux déshérités et un yakuza atteint de tuberculose qui refuse de se soigner. Les deux hommes par leur obstination et leur violence, finissent par se respecter et se rejoindre dans leur combat, autodestructeur chez le gangster, plus lucide chez le docteur, contre un monde invivable.

Toshiro Mifune dans L'Ange ivre de Akira Kurosawa

Toshiro Mifune et Takashi Shimura dans L’Ange ivre de Akira Kurosawa

 

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