Olivier Père

Le Conformiste de Bernardo Bertolucci

ARTE diffuse lundi 29 juin à 20h50 Le Conformiste (Il conformista, 1970) de Bernardo Bertolucci. Après avoir signé en 1968 un essai poétique et radical, très godardien et symptomatique de l’après mai, Partner, avec Pierre Clémenti et Tina Aumont Bernardo Bertolucci abandonne définitivement le cinéma d’avant-garde avec cette adaptation luxueuse d’un roman de Moravia sur le fascisme, Le Conformiste avec Jean-Louis Trintignant dans le rôle principal, entouré de Dominique Sanda et Stefania Sandrelli, qui remporte un grand succès et impose Bertolucci comme un styliste de la caméra, virtuose sensualiste et provocateur. Ce film marquera aussi le début de la carrière internationale du jeune cinéaste parmesan, et de sa collaboration avec le brillant directeur de la photographie Vittorio Storaro.

Fasciste par conformisme, Marcello (Trintignant) est envoyé par les services secrets de Mussolini en 1938 en mission en France pour approcher et supprimer son ancien professeur de philosophie en exil qui lutte au sein d’un groupe de résistance antifasciste. Il part avec sa jeune et insouciante épouse Giulia (Sandrelli) en prétextant leur voyage de noces. A Paris, Marcello rencontre le professeur en compagnie de sa séduisante femme Anna (Sanda), du même âge que Giulia.

Le Conformiste participe à la mode rétro, fictions historiques centrées autour du fascisme et du nazisme en Europe après le succès des Damnés de Luchino Visconti. L’héritage esthétique viscontien est évident chez Bertolucci – comme il le sera dans Portier de nuit de Liliana Cavani – mais aussi celui du cinéma français moderne puisque Bertolucci choisit Jean-Louis Trintignant, Dominique Sanda (« modèle » bressonnien) et George Delerue le compositeur de François Truffaut (La Peau douce) et Jean-Luc Godard (Le Mépris), parmi d’autres citations de la Nouvelle Vague. Situé dès ses débuts sous l’ombre tutélaire de Godard et Pier Paolo Pasolini, Bertolucci prend ses distances avec ses maîtres en travaillant sur une production de prestige qui connaîtra un fort retentissement aux Etats-Unis. Il poursuit cependant de manière biaisée son désir de filiation puisque Moravia était l’un des meilleurs amis de Pasolini et la plus fameuse adaptation cinématographique d’un de ses romans était précédemment signée Jean-Luc Godard – Le Mépris.

Aux manettes d’un portrait psychologique doublé d’un thriller politique Bertolucci demeure fidèle à une approche marxiste et surtout psychanalytique de l’Histoire.

Des retours en arrière révèlent que Marcello enfant fut victime d’un trauma qui explique sa froideur émotionnelle, relie sexe et violence dans son inconscient et suscite ce besoin de conformisme du personnage, pour échapper à ses démons intimes et au chaos familial, en profitant des valeurs de force et de brutalité imposées par le régime fasciste.

Catégories : Sur ARTE

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *