Olivier Père

Cannes 2013 Jour 7 : Les Salauds de Claire Denis (Sélection officielle – Un Certain Regard)

Capitaine à bord de porte-conteneurs, Marco Silvestri (Vincent Lindon) rentre d’urgence à Paris. Le mari de sa sœur Sandra vient de se suicider, l’entreprise du couple est en faillite et leur fille unique (Lola Créton) à la dérive. Sandra désigne le coupable : l’homme d’affaires Edouard Laporte (Michel Subor). Marco loue un appartement dans l’immeuble où Laporte a installé sa maîtresse, Raphaëlle (Chiara Mastroianni), et leur fils. Il séduit Raphaëlle pour se rapprocher de Laporte et tenter de comprendre la véritable nature de ses agissements et de ses liens avec son beau-frère. Au fil de son enquête, et d’un voyage sans retour au bout de la nuit, Marco va découvrir des abymes de ténèbres et de corruptioLes Salauds est un très grand film de Claire Denis au sommet de son art, lointainement inspiré des salauds dorment en paix (1960) d’Akira Kurosawa. Ce chef-d’œuvre du grand réalisateur japonais, avec son acteur fétiche Toshiro Mifune, illustrait le thème de la vengeance sociale et attaquait avec une virulence impitoyable le système politique et économique du Japon moderne, qui conduisait son peuple vers la misère.

Claire Denis comme à son habitude ne quitte pas la sphère des sentiments élémentaires même quand elle se confronte à un sujet qui, comme le classique de Kurosawa, ne masque pas sa dimension politique. Les Salauds est à la fois une épure de film noir, concrète jusqu’à l’asphyxie et un thriller métaphysique sur le triomphe du Mal, assez vertigineux. Ce pourrait être une série B de Walsh ou Tourneur si Claire Denis, dont le style n’a jamais été aussi sobre, n’allait pas sonder les tréfonds de l’âme humaine avec une violence encore plus insoutenable qu’elle n’existe quasiment pas à l’écran, mais déborde du film. Les acteurs, familiers ou nouveaux venus dans l’univers de la cinéaste sont tous magnifiques, dans l’intensité et la rétention au diapason du film. On ne sait dans quel état de désespoir, de fièvre ou de rage Claire Denis a trouvé la force d’imaginer, de raconter et de mettre en scène une aussi ténébreuse affaire. Nul doute que Les Salauds est un diamant noir dans sa filmographie, radioscopie intime et tableau sans concessions d’un monde, le nôtre, qui va à sa perte.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le film est une coproduction ARTE France Cinéma et sortira en salles le 14 août, distribué par Wild Bunch.

 

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