Olivier Père

Max et les Ferrailleurs de Claude Sautet

ARTE diffuse ce soir Max et les Ferrailleurs à 22h40 dans le cadre d’une soirée consacrée à Romy Schneider au cours de laquelle sera également diffusé La Piscine (1969) de Jacques Deray à 20h45. L’actrice, au sommet de sa beauté, y trouve deux de ses meilleurs rôles. La Piscine marque le retour sur le devant de la scène de Romy Schneider après une éclipse de sa carrière en France. Les producteurs ne voulaient plus d’elle. C’est sur l’insistance de son ancien amant Alain Delon que l’actrice allemande obtint le rôle féminin principal de ce huis-clos amoureux et criminel dans une villa de Ramatuelle, brillamment écrit et mis en scène. Delon avait raison. Le film sera un grand succès. Il imposera définitivement Romy Schneider comme une valeur sûre du box office et elle restera jusqu’à sa fin tragique et prématurée l’une des actrices préférées des français. Et le couple Delon Schneider, reformé à l’écran, n’a jamais été aussi beau.

Mais passons au film de la deuxième partie de soirée. Max et les Ferrailleurs(1971) est un titre charnière dans la filmographie de Claude Sautet. Il marque ses adieux au polar et le début de ses études de caractères, chorales ou centrées sur un couple, un homme ou une femme. Ici il y a le groupe (les « ferrailleurs » du titre, une bande de banlieusards marginaux qui vivote de magouilles et de vols organisés), la femme Lily une prostituée d’origine allemande adoptée par les « ferrailleurs » (Romy Schneider) et surtout l’homme, Max : un ancien juge reconverti en flic et obsédé par le flagrant délit qui va échafauder un plan pervers pour remédier à l’humiliation d’un échec personnel lors d’une enquête sur des braqueurs de banques. Dans le rôle de Max Michel Piccoli livre une composition magistrale, fonctionnaire de police psychorigide, solitaire, froid comme la mort, vêtu de noir et au teint de cire. Presque un vampire ou un maniaque dont la silhouette semble échappée d’un film de Buñuel ou de Melville, experts en cas pathologiques. C’est sans doute l’un des plus grands rôles de Piccoli et surtout l’un des personnages les plus fascinants du cinéma français des années 70.

Difficile devant Max de ne pas penser à la figure – maléfique – du metteur en scène qui invente un scénario capable de combler son désir le plus inavouable, choisit les protagonistes parmi lesquels une belle jeune femme qu’il va séduire de la plus cynique manière pour parvenir à ses fins, manipule à distance la volonté d’hommes dont il envie la liberté et qu’il va réduire par jalousie et frustration à l’état de marionnettes. Bien entendu, comme dans tout grand film de casse ou de machination qui se respecte, un grain de sable va réduire à néant cette entreprise méticuleuse pourtant née d’un pur hasard. Et comme dans tout grand film noir qui se respecte, « cherchez la femme. »

Difficile devant Max de ne pas penser à Sautet : folie dissimulée sous une apparence de conformisme bourgeois, intelligence et perfectionnisme, passion maladive des femmes. Certes l’autoportrait n’a rien de flatteur mais il révèle la part secrète, la violence rentrée d’un cinéaste qu’il faudra bien un jour redécouvrir et réévaluer à sa juste valeur. On en vient à regretter devant Max et les Ferrailleurs que Sautet n’ait pas continué à réaliser d’autres films policiers de la même envergure. Classe tous risques (1960), c’était déjà très bien.

 

 

 

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