ARTE diffuse ce soir à 22h14 La Guerre des mondes (The War of the Worlds, 1953) de Byron Haskin, d’après le chef-d’œuvre de la littérature de science-fiction de H.G. Wells publié en 1898. Le romancier anglais imaginait l’errance d’un homme dans la banlieue de Londres après une invasion extra-terrestre. Le succès fut considérable et entraîna une liste interminable de livres, films, bandes dessinées et jeux vidéo brodant autour du même thème.
En 1938 le jeune Orson Welles adapte en dramatique radio le roman de Wells avec sa troupe du Mercury Theatre. Sa mise en ondes de l’attaque des martiens est si réaliste et dramatique qu’elle terrifie les auditeurs qui pensent écouter un flash d’information. Avec son légendaire sens de l’exagération et de l’autopromotion Welles transforma au fil des ans quelques mouvements de panique en véritable hystérie collective qui aurait frappé tout le pays.
En 1953 George Pal, grand spécialiste du cinéma d’animation passé à la mise en scène et à la production de films à effets spéciaux décide de produire La Guerre des mondes pour le grand écran. Avec le réalisateur Byron Haskin, lui aussi expert en trucages cinématographiques, ils transposent l’action dans une petite ville de Californie. C’est une entreprise courageuse car au début des années 50 les films de science-fiction ne sont pas encore à la mode à Hollywood. Il s’en tourne très peu et la plupart du temps par des petits studios pour des budgets de misère et en noir et blanc. La Guerre des mondes est en Technicolor et c’est un film Paramount, l’une des plus grandes compagnies hollywoodiennes. La réussite du film et le caractère spectaculaire des effets spéciaux ouvriront la voie à d’autres films de science-fiction comme Planète interdite (1956) produit par la MGM tandis que Haskin récidivera avec La Conquête de l’espace (1955), De la Terre à la Lune (1958, d’après Verne) et Robinson Crusoe on Mars (1964, d’après Defoe.)
Dans le contexte de la Guerre Froide, une invasion venue de la planète rouge est une manière à peine déguisée de mettre en garde contre le péril communiste.
En revoyant le film on est frappé par la proximité avec le cinéma de Cecil B. DeMille, influence directe du travail de Haskin. La première fois que les habitants de la paisible bourgade californienne assistent à la chute de ce qui ressemble à un météorite, ils sortent d’un cinéma qui projette Samson et Dalila, chef-d’œuvre de 1949 de DeMille dont on aperçoit l’affiche dans un coin du cadre. La Guerre des mondes et Samson et Dalila partagent d’ailleurs de même directeur de la photographie, George Barnes qui signera aussi l’image du film suivant de DeMille, Sous le plus grand chapiteau du monde.
Mais la référence à DeMille ne s’arrête pas ce clin d’œil. Les scènes de dévastation de la ville par les soucoupes volantes armées de rayons laser évoquent les séquences apocalyptiques de destruction ou d’accidents spectaculaires qu’affectionnait DeMille dans ses films historiques ou ses mélodrames, dès le muet. La Guerre des mondes est aussi un film profondément chrétien et la victoire finale ne surviendra pas par la force mais par la prière, avec les héros réfugiés dans une église. Là encore, une scène qui n’aurait pas déplu au réalisateur du Signe de la croix et des Dix Commandements.
Cet air de famille est confirmé dans les faits puisque DeMille aurait participé à la production de La Guerre des mondes, sans être crédité au générique. Mais nous ne connaissons pas son degré d’implication artistique dans le projet.
Sept ans plus tard George Pal produira et réalisera une autre adaptation cinématographique d’un roman de Wells encore plus belle que La Guerre des mondes, La Machine à explorer le temps avec Rod Taylor et Yvette Mimieux.
En 2005 Steven Spielberg réalise une nouvelle version de La Guerre des mondes avec Tom Cruise et signe l’un de ses meilleurs films.
Quant à Samson et Dalila, nous le reverrons avec plaisir samedi 27 avril à 20h sur grand écran dans le cadre de la carte blanche à Albert Serra qui se poursuit au Centre Pompidou.
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