Dino Risi (1916-2008) n’était pas seulement le principal inventeur de la « comédie à l’italienne ». La reprise cette semaine sur les écrans d’Au nom du peuple italien (In nome del popolo italiano, 1971), également connu sous le titre français Le Petit Juge, grâce au distributeur Les Acacias, permet de vérifier que Risi était avant tout un cinéaste formidable, à l’intelligence aussi mordante que salutaire, un satiriste et un moraliste
Risi fit des études de médecine et il était psychiatre avant de rejoindre par hasard le monde du cinéma. Dans ses films, Il a ausculté l’Italie comme un corps et un cerveau malades avec la bêtise, la veulerie et la cupidité dans le rôle des principaux symptômes.
Au milieu d’œuvres plus légères, Au nom du peuple italien demeure le film le plus féroce de Risi sur la corruption généralisée d’un pays en pleine décadence, et prophétise les heures les plus sombres du berlusconisme.
Le juge Bonifazi (Ugo Tognazzi) est un magistrat honnête et intransigeant ayant une conception très personnelle de la justice ; il lutte contre les deux principaux fléaux qui pervertissent la société italienne de l’après-guerre : la corruption et la spéculation. En enquêtant sur la mort d’une jeune fille, il est amené à interroger Santenicito (Vittorio Gassman), un riche industriel corrompu qui semble lié à cette disparition. Voleur, menteur, pollueur, cynique et arrogant, Santenicito incarne tout ce que Bonifazi exècre. Son enquête va se transformer en croisade et il va tout faire pour accorder la réalité à son désir le plus profond : prouver que Santenicito est aussi un assassin. Les deux hommes, obsédés l’un par l’autre, vont s’engager dans un affrontement pathologique aux dimensions de tout un pays.
La mise en scène de Risi se caractérise par une simplicité fonctionnelle qui ne faisait qu’exacerber la monstruosité des personnages et la démesure des situations. Elle est aussi modeste que ses acteurs de prédilection (ici Tognazzi et Gassman, ailleurs Sordi ou Manfredi) sont grandioses. Ce film rappelle que la comédie à l’italienne a bien souvent mal porté son nom. L’humour et la farce dissimulent mal des dimensions dramatiques, et même tragiques.
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