Nouvelle chance

Désormais garçon de bain à la piscine du Ritz pour nourrir la famille qu'il a fondée avec Kumiko, Augustin Dos Santos ("avec deux os") n'en a pas pour autant renoncé à l'art. Il écrit, produit, met en scène et interprète tout seul des spectacles improbables, programmés dans les fêtes d'entreprise, les maisons de retraite et autres foyers pour naufragés de l’existence. Un soir où, costumé en Japonaise, il conte dans une indifférence quasi complète la tragédie d'une enfant trouvée au cœur pur, une femme âgée, Odette Saint-Gilles, qui tint jadis le premier rôle dans des opérettes de seconde zone, vient le féliciter après la représentation, puis lui offre un verre de porto dans sa chambre. Quelques jours plus tard, une filiale suédoise lui réclamant "quelque chose de très français" pour épater la maison mère lors de sa visite, il repense à Odette et à la pièce qu'elle a rêvé en vain de jouer, Les salons. Celle-ci met en scène la rivalité (authentique) entre une reine déchue des beaux esprits du XVIIIe siècle, Mme du Deffand, et sa nièce, Julie de Lespinasse. Mais qui pourrait incarner cette dernière ?

Poétique étrangeté
Dernier volet d'une trilogie créée autour de l'attachant Augustin, sorte de Buster Keaton fin de (XXe) siècle incarné par le comédien Jean-Chrétien Sibertin-Blanc, frère d'Anne Fontaine, Nouvelle chance approfondit l'art du décalage avec une fantaisie en roue libre. Aux côtés d'apparitions pittoresques, dont Jack Lang dans son propre rôle et Andy Gillet en jeune premier imbu de lui-même, deux actrices au tempérament aussi dissemblable que marqué, Danielle Darrieux et Arielle Dombasle, s'ingénient à faire dévier le placide Augustin de sa trajectoire. Entre burlesque et mélancolie, un film d'une poétique étrangeté, à l'image de "La folle complainte", la chanson de Trénet qui en est le point d'orgue, joliment chantée par Danielle Darrieux.