Quand la nuit se soulève

Dans un noir et blanc granuleux, les pics volcaniques réunionnais, la végétation luxuriante et les cascades défilent, accompagnés par la voix off d’une jeune femme qui s’interroge sur son métissage. A contrario, à 9 000 kilomètres de là, de l’autre côté de la mer, quelques plans fixes en couleurs captent depuis le trottoir détrempé l’atmosphère de Mâcon, petite ville de Bourgogne. Dans un café PMU, un homme élancé se tient droit face à la caméra : il s’appelle Jean-René, a quitté La Réunion pour la métropole en 1974, à l’âge de 17 ans, et pour la première fois, il raconte à sa fille son départ en exil.

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En filmant son propre père et en découvrant son passé familial, Erika Étangsalé explore les blessures intimes laissées par l'histoire coloniale française. Mêlant des photos de famille à des images d’archives, contextualisant la politique migratoire française des années 1960-1980 portée par le Bumidom (le Bureau pour le développement des migrations dans les départements d’outre-mer), ce documentaire explore en douceur la "difficulté de s’adapter", la transmission du créole (Lèv la tèt dann fenwar est la version originale du beau titre du film) et le difficile retour au pays natal. Une œuvre qui porte aussi un regard fort sur l'esclavage et l'exploitation, tout en restituant l'intimité de ce dialogue entre père et fille. "Ce que tu fais, toi [filmer], j’aurais bien voulu le faire quand j’étais jeune", glisse Jean-René face à la caméra.