Sur nos lèvres : rouge un jour, rouge toujours ?

Se colorer les lèvres ? Une vieille habitude. L'érotique papyrus de Turin, représentant une femme assise sur un objet phallique un bâton de rouge à la main, révèle que ce geste se pratique sous l'Égypte ancienne. Dans la France du XVIIIe siècle, la cour raffole du maquillage et les visages, littéralement redessinés, se parent de couleurs suaves pour se distinguer du commun des mortels. La révolution met un terme à ces frivolités. Au cours du siècle suivant, une barrière cosmétique s'élève entre les honnêtes femmes sans artifice et celles dites "de petite vertu", à la bouche empourprée. Récupéré outre-Atlantique par les suffragettes, le rouge à lèvres deviendra par la suite l'emblème de femmes combattives qui s'assument comme telles.

Long en bouche
Des ménagères pomponnées des fifties" "aux stars pop-rock provocantes, des ouvrières censées soutenir l'effort de guerre (tout en restant féminines) aux punks aux lèvres sanguines, des filles aux garçons d'aujourd'hui qui revendiquent des identités multiples, ce petit tube d'une grande longévité, et pas à une contradiction près, a incarné tour à tour le conformisme, le pouvoir ou la rébellion. Peuplé par une armada de lèvres – glossées, ourlées, surlignées, voire surdimensionnées –, paré de vidéos glanées sur Tiktok ou Youtube, ce documentaire se nourrit aussi d'éclairages d'historiennes ou d'influenceurs avisés. La biographie glamour d'un objet où se reflète notre société, à la croisée des problématiques de genre, de féminisme ou d'écologie.