Olivier Père

Le Vieil Homme et l’Enfant de Claude Berri

ARTE diffuse lundi 21 septembre à 20h50 Le Vieil Homme et l’enfant (1967), premier long métrage de Claude Berri réalisé deux ans après Le Poulet qui lui avait valu l’Oscar du meilleur court métrage de fiction en 1966 – Le Poulet est également diffusé sur ARTE dans le cadre du magazine « Court-circuit » le vendredi 18 septembre à 0h25, et disponible sur ARTE+7.

Les deux films se déroulent dans la France rurale. Berri puise son inspiration dans un article lu dans le journal pour Le Poulet, dans ses souvenirs d’enfance pour Le Vieil Homme et l’Enfant. Dans la France occupée Claude, un petit garçon juif est envoyé à la campagne dans la région de Grenoble par ses parents qui souhaitent le protéger du risque des rafles et de la déportation. Sous une fausse identité il débarque chez un vieux couple d’ouvriers retraités, pétainistes et antisémites. Une tendre amitié lie rapidement le petit Claude et Pépé, inséparable de son chien, amoureux des animaux, qui va faire du gamin son confident et son complice. Vétéran de la Première Guerre mondiale Pépé se vante de ses convictions anticléricales et anti gaullistes, déteste les Juifs et les Anglais. Comme beaucoup de Français de sa génération il voue une fidélité indéfectible au Maréchal Pétain, héros de Verdun et sauveur de la patrie. Le film montre aussi les tensions politiques et la fracture qui pouvaient exister au sein de chaque famille française à propos de de Gaulle et du gouvernement de Vichy. Mais la campagne est aussi un havre de tranquillité, un lieu de rires et de jeux grâce à Pépé en dehors de brimades et du cadre strict du monde des enfants et de l’école. Le petit garçon contraint de dissimuler sa judéité doit écouter les diatribes antisémites du vieillard conditionné par la propagande vichyssoise, s’en effraie et s’en moque. Claude et Pépé font ensemble l’école buissonnière et les quatre cents coups. Les Quatre Cents Coups, justement. François Truffaut aimait Le Vieil Homme et l’Enfant, y saluait une évocation juste de la vie des Français sous l’Occupation, un humour et une émotion sans pathos. Pas de relation Doinel-Truffaut dans le cinéma de Berri, pas de double cinématographique. Berri est Berri, ou plutôt Langmann. Ses films relèvent plus de l’autofiction – quand ce mot ne désignait pas encore un courant littéraire – que de l’autobiographie fictionnelle, même si l’invention et le romanesque s’invitent dans Le Vieil Homme et l’Enfant, davantage que dans les films qui suivront. Ce surplus poétique c’est bien sûr Michel Simon, légende vivante du cinéma, qui le transporte avec lui, le personnage de Pépé charriant les souvenirs de Boudu, du père Jules de L’Atalante et la mythologie personnelle de cet acteur de génie. Monstre de méchanceté, de bêtise et de tendresse Pépé, fâché avec le monde des hommes, communie avec celui des animaux et des enfants. On découvre dans Le Vieil Homme et l’Enfant cette énergie vitale, ce refus de l’apitoiement devant les tragédies intimes et celles de l’Histoire qui font le prix des meilleurs films de Berri.

 

 

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