Au XVIème siècle, l’alchimiste Fulcanelli a fui l’Inquisition et s’est réfugié à Veracruz. Devenu horloger officiel du vice-roi, il invente un étrange mécanisme qui permet d’accéder à la vie éternelle. Quatre cents ans plus tard, l’alchimiste meurt dans l’effondrement d’un immeuble et emporte son secret avec lui. A l’époque actuelle à Mexico, Jesús Gris, un vieil antiquaire, découvre l’horloge de Cronos dissimulée dans une statue. L’objet lui injecte un puissant venin qui lui redonne force et jeunesse, mais le rend dépendant au sang humain. Devenu un monstre, Jesús ne peut compter que sur l’aide de sa petite-fille. Le duo doit lutter contre un richissime homme d’affaires rongé par la maladie, prêt à tout pour posséder le mystérieux appareil.
Cronos est le premier long métrage de Guillermo del Toro, qu’il réalise en 1992 à l’âge de vingt-huit ans après avoir créé sa propre société spécialisée dans les effets spéciaux et fait ses armes à la télévision. Dès ses débuts de cinéaste, del Toro s’aventure dans les registres de l’imaginaire et du fantastique. Il affiche une ambition exceptionnelle et se retrouve à la tête d’un des plus gros budgets de l’histoire du cinéma mexicain. Cronos brasse divers éléments visuels et narratifs empruntés au mélodrame et au film d’horreur, deux genres chéris par le jeune réalisateur cinéphile, qui se souvient des classiques vénéneux de Mario Bava, Terence Fisher ou Dario Argento. Les influences de Cronos se trouvent aussi dans les œuvres fondatrices de l’horreur moderne signées George A. Romero et David Cronenberg, qui assimilent le vampirisme à l’addiction à la drogue et à la contagion virale. Pourtant, Cronos ne se limite pas à un amalgame de références et d’hommages. Guillermo del Toro se révèle d’emblée un véritable créateur d’univers et un formidable conteur, capable d’entraîner son audience dans un tourbillon d’émotion fortes teintées d’humour noir. Son art du récit se combine au soin qu’il apporte à la scénographie et à la direction artistique. Chaque élément de décor, chaque éclairage alimentent un symbolisme élaboré des formes et des couleurs et induisent des annotations sur la caractérisation et les motivations des personnages. Guillermo del Toro parvient ainsi à indiquer au spectateur une multitude d’informations psychologiques sans avoir recours aux dialogues, par la seule force évocatrice de ses images. Cronos contient plusieurs thèmes qui feront leurs réapparitions régulières dans la filmographie de Guillermo del Toro, à commencer par l’amour des monstres, ainsi que l’enfance confrontée au danger, à la violence et à la mort. La complicité entre Jesús Gris (l’acteur argentin Federico Luppi) et Aurora, sa petite-fille orpheline de huit ans, offre les moments les plus émouvants du film. Le réalisateur inverse les rôles et fait de la fillette la protectrice de son grand-père, homme-enfant frappé par une malédiction. Découvert à la Semaine de la Critique du Festival de Cannes, Cronos a ouvert à Guillermo del Toro la voie de la reconnaissance internationale. Malgré cela, il était resté inédit au cinéma en France, seulement exploité en vidéo. Il demeure à ce jour son unique film tourné au Mexique.
Trente-trois ans après sa réalisation, Cronos sort enfin dans les salles françaises, restauré en 4K et distribué par Les Films du Camélia, mercredi 26 février.
Laisser un commentaire