Olivier Père

Incroyable mais vrai de Quentin Dupieux et Tout simplement noir de Jean-Pascal Zadi et John Wax

ARTE propose de voir ou revoir ces deux comédies françaises récentes, qui se démarquent par leur originalité et leur regard incisif et caustique sur notre époque, et ont rencontré un succès mérité lors de leur sortie en salles.

 

Incroyable mais vrai (2022) compte parmi les réussites de Quentin Dupieux. Amateur de film-concepts et de partis-pris excentriques, le cinéaste ajoute ici une part de satire et de métaphysique à son goût du délire surréaliste.

Alain et Marie s’installent dans le pavillon de banlieue de leurs rêves. Mais l’agent immobilier les a prévenus : ce qui se trouve au sous-sol risque bien de changer leur vie… Après Le Daim, et avant Le Deuxième Acte (pour ne citer que deux titres récents du plus prolifique des réalisateurs français), Quentin Dupieux pousse encore plus loin son regard inquiet, absurde et décalé sur la société. Incroyable mais vrai est une fable fantastique doublée d’une critique des vanités contemporaines, où l’apparence physique, la recherche de la jeunesse éternelle, la réussite sociale et la virilité continuent d’obséder nos semblables. Le cinéma de Dupieux doit beaucoup à ses interprètes : Alain Chabat, Léa Drucker, Anaïs Demoustier et Benoît Magimel son excellents dans Incroyable mais vrai.

 

Tout simplement noir (2020) est le premier long métrage de Jean-Pascal Zadi, qu’il a co-réalisé (avec John Wax), co-écrit (avec Kamel Guemra) et dont il tient le rôle principal, en floutant la frontière entre autofiction et personnage inventé.
JP, un acteur dont la carrière n’a jamais décollé, cherche à organiser une grande marche à Paris pour protester contre la sous-représentation des Noirs dans la société et les médias. Mais sa maladresse va compliquer son projet. Sur un sujet sensible, Jean-Pascal Zadi a réussi une comédie hilarante. Le film adopte la forme d’un faux reportage où une équipe de cinéma suit JP lors de ses démarchages auprès de célérités dans leurs propres rôles. La mise en scène donne ainsi l’impression de réactions spontanées devant la caméra, avec des conséquences drolatiques. Jean-Pascal Zadi est la grande révélation de Tout simplement noir. Dans ce film nourri de son vécu et de sa personnalité, il manie avec beaucoup de talent l’autodérision et fait preuve d’un humour à la fois absurde et engagé. L’enchaînement de saynètes satiriques et parfois cruelles permet d’évoquer les grands moments de la comédie italienne.

 

Tout simplement noir est disponible sur ARTE.tv jusqu’au 7 janvier 2025 et sera diffusé à l’antenne mercredi 11septembre à 20h55.

 

Incroyable mais vrai est diffusé le mercredi 14 août à 20h55 et sera également disponible en télévision de rattrapage sur ARTE.tv à partir de cette date.

Catégories : Coproductions · Sur ARTE

6 commentaires

  1. JICOP dit :

    Bonjour Olivier .
    Je n’étais guère fan de Dupieux jusqu’à la vision du  » daim  » et  » Mandibules  » .
    C’est clairement un auteur à part , avec un univers barré mais étrangement structuré . Je le classerai du coté de Lynch ou Cronenberg par un coté presque mathématique dans l’évolution du récit et un ton absurde .
    J’ai enregistré cet  » Incroyable mais vrai  » , curieux de le voir .

    • Olivier Père dit :

      Bonjour JICOP, cinéaste inégal mais qui ne le serait pas quand on réalise deux films par an en moyenne ? Je considère Incroyable mais vrai comme une de ses réussites.

  2. Damien dit :

    Comparer Dupieux à Lynch et Cronenberg est quand même très audacieux…
    Dupieux pour moi n’est pas un auteur comme les deux autres mais plus un faiseur, un technicien de l’image qui souvent se laisse déborder par la prise de vue. C’est la caméra qui filme plus que lui. Il part d’une idée et ensuite laisse la caméra ou l’appareil photo diriger le film. C’est pour cela que cela a dû mal à tenir sur plus d’une heure sinon la supercherie serait trop visible.
    Il s’appuie ensuite beaucoup, comme au théâtre, sur les acteurs pour tenir sur la longueur. Donc il faut qu’ils soient bons. Cela fonctionne avec Raphaël Quenard mais c’est très faible avec Dujardin qui est souvent faux dans la voix et les intentions. Une preuve supplémentaire dans le film SUR DES CHEMINS NOIRS, où il sabote à lui seul une histoire qui pouvait être intéressante.
    Dupieux est plus un publicitaire, un professionnel du marketing qu’un cinéaste. Mais nous sommes à l’ére des réseaux sociaux où il faut être bref et surprenant pour exister. Donc Dupieux est bien dans son époque. Des films Mac Do avec toujours la même recette et rapidement assimilables.

  3. Bertrand Marchal dit :

    je trouve que Dupieux vaut nettement plus que le jugement que Damien en fait. Je viens de voir le Deuxième acte et je l’ai trouvé très réussi. Ses ratage sont rares, et d’autant plus regrettables qu’il a un talent énorme.
    Parfois, il cède gravement à la séduction d’une idée bizarre qui n’a pas les épaules pour faire un film, comme c’était le cas de Mandibules, Fumer fait tousser, ou Daaaali. Ses films récents témoignaient d’une vraie désinvolture de branleur compulsif, jusqu’à Yannick qui retrouvait de l’inspiration et encore davantage avec son dernier.
    Mais c’est aussi l’un des rares cinéastes qui passe son temps à s’interroger sur son métier. C’est un vrai bon directeur d’acteurs, il a un vrai sens du cadrage, de la mise en scène et son univers est à la fois loufoque, réaliste et jusqu’au-boutiste; le contraste entre le fantastique et le réalisme donne systématiquement une dimension kafkaïenne à ses films qui est très efficace.

    Le deuxième acte m’a fait énormément rire, et réfléchir aussi (moins, mais le film n’est pas une dissertation non plus). Un cinéaste précieux qui n’a pas son pareil , ni en France ni ailleurs.

  4. Nicolas Massoulier dit :

    Je n’ai pour l’instant vu que deux films de Q. Dumieux : Rubber (mais dans de très mauvaises conditions,avec un entourage hostile, fermé, donc je le laisserait de côté) et, surtout, Wrong cops. Par certains côté, ce que j’ai pu voir du cinoche de Dupieux ne fut pas sans me rappeler Bunuel. La scène ou le « wrong cops » vend sa marijuana dans le corps de rats morts est, à proprement parler, sans abus de langage comme on le fait bien trop souvent quand on use de ce terme « surréaliste ». La linéarité du réel est subtilement brisé, mais le plus comique -et je n’use point du mot par hasard – est qu’après un premier temps de surprise -oh, bien légère ! – tous les protagonistes acceptent l’idée qu’effectivement,rien ne vaut le corps d’un rat mort pour transporter de l’herbe. Cette idée, ce moment (je ne sais trop comment qualifier ce choix du réalisateur) me parait symptomatique de Dupieux. Nous sommes dans un monde où ma « raison » suit -ou est susceptible de suivre – d’autres règles. Je m’arrête là, ayant grand peur de pontifier, surtout qu’ainsi dit plus haut, je n’ai vraiment vu en bonnes conditions qu’un seul film de Dupieux. Il possède en tous cas quelque chose que beaucoup, mais alors là vraiment beaucoup de cinéastes pourraient lui envier, c’est une vraie singularité, un œil qui n’appartient qu’à lui, un monde et un espace qui sont siens. C’est rare…

  5. Nicolas Massoulier dit :

    Ps « Nous sommes dans un monde ou LA raison est susceptible etc etc ». (Avant avant dernière phrase)
    Et pardon pour les fautes inacceptables ainsi que pour « Dumieux ». Je sais bien que le lecteur comprend, mais ça ne m’en énerve pas moins aussi je cède au pitoyable espoir de réparer un tant soit peu cette prose fatiguée, mais sans entrer dans le détail.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *