Tilda Swinton est à l’honneur sur ARTE puisqu’on peut actuellement admirer l’actrice britannique dans trois films. L’un peut être considéré comme le sommet de sa collaboration avec le cinéaste italien Luca Guadagnino, les deux autres marquent sa rencontre avec deux des plus grands auteurs contemporains, Apichatpong Weerasethakul et Pedro Almodóvar.
Luca Guadagnino, né en 1971, est un cinéaste italien assez passionnant dans la mesure ou ses films revendiquent leur nature d’objets post-maniéristes, qu’on pourrait définir comme les équivalents cinématographiques des « covers » musicaux. Guadagnino y réinterprète les motifs ou les sujets d’œuvres préexistantes, avec un talent et un sens de l’image qui lui sont propres. Ainsi, Amore (Io sono l’amore, 2009) se présente comme une variation viscontienne sur la haute société milanaise, avec ses transactions économiques et ses conflits de génération. La mise en scène est classieuse, le style ultra léché. Guadagnino échappe à la vacuité luxueuse grâce à la complicité de son égérie Tilda Swinton, au charisme fou, qui passe du russe à l’italien avec une aisance déconcertante. Elle incarne une nouvelle Madame Bovary qui retrouve le désir et le goût de vivre dans les bras d’un jeune chef cuisinier. Son orgasme lors de la dégustation d’une salade de crevettes est le véritable point de bascule du film, ou son « climax », dans toutes les acceptations de ce mot.
Apichatpong Weerasethakul compte parmi les quelques artistes plasticiens qui ont débuté leur carrière dans le cinéma expérimental avant de d’imposer rapidement comme de grands cinéastes. De film en film, Weerasethakul a bâti une œuvre qui offre une approche sensorielle du monde, toujours entre rêve, légende et réalité. Il travaille également la mémoire et le désir comme des matières fluides, capables de circuler entre les humains, les animaux et des êtres hybrides. Cinéaste des voyages intérieurs, Weerasethakul a beaucoup filmé la jungle et la nature. Il quitte dans Memoria (2021) sa Thaïlande natale pour partir à la découverte de Bogota et de la forêt colombienne. Memoria suit une trame narrative relativement simple, mais s’intéresse surtout à un son mystérieux et obsédant, que seule Jessica (interprétée par Tilda Swinton, parfaitement à l’aise dans l’univers de Weerasethakul), semble être en mesure d’entendre. Entre Antonioni et Jacques Tourneur, Memoria propose une enquête fascinante en forme d’aventure cosmique.
Amore de Luca Guadagnino : disponible gratuitement sur ARTE.tv jusqu’au 30 septembre.
Memoria de Apichatpong Weerasethakul : diffusion sur ARTE fin juillet, puis disponible en télévision de rattrapage sur ARTE.tv.
La Voix humaine de Pedro Almodóvar : disponible gratuitement sur ARTE.tv jusqu’au 30 septembre.
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