Olivier Père

L’Homme de la loi de Michael Winner

L’Homme de la loi (Lawman, 1971) est le premier film américain produit et réalisé par Michael Winner, pour la MGM. Le tournage s’est déroulé au Mexique, tandis que celui des Collines de la terreur, l’année suivante, sera délocalisé en Espagne. L’Homme de la loi appartient au genre du western, rarement abordé par les cinéastes britanniques, ce qui démontre la volonté de Winner de s’intégrer à la culture étasunienne et au système des studios hollywoodiens. L’Homme de la loi brosse le portrait d’un shérif impassible dont l’obsession pour la justice et le respect de la loi et l’ordre vire à une forme de pathologie proche de la vengeance personnelle. Il est aussi violent et cinglé que la horde de truands qui se dresse contre lui, et anticipe ainsi les personnages névrotiques de tueur ou de justicier proposés par Winner dans ses films avec Bronson.

L’Homme de la loi s’inscrit dans une trilogie de westerns interprétés par un Burt Lancaster vieillissant, magnifique de virilité blessé. Le film de Winner sera en effet suivi par Valdez et Fureur Apache, chef-d’œuvre de Robert Aldrich.

Dans le film de Winner, Lancaster est entouré d’une distribution prestigieuse : Lee J. Cobb, Robert Ryan, Robert Duvall, qui héritent de rôles complexes ou pathétiques et se révèlent eux aussi remarquables.

Winner, cinéaste très controversé et déprécié par la critique, a souvent été qualifié de « tâcheron réactionnaire ».

Du point de vue esthétique, ce jugement condamnait une nouvelle forme de mise en scène apparue vers la fin des années 60, notamment en Italie, en l’occurrence l’utilisation systématique du zoom et du grand angle. Winner possède un style assez ostentatoire qui peut paraître vulgaire par rapport au classicisme, alors sur le déclin. Ces reproches ont aussi été adressés à Sam Peckinpah et Sergio Leone. Quand on revoit L’Homme de la loi aujourd’hui, il est difficile de les soumettre à une vindicte aussi catégorique. Le film bénéficie d’une photographie, d’un montage, d’une mise en scène toujours inventive, parfois un peu grotesque – marque du style de Winner.

On a aussi vivement critiqué Winner pour son sadisme et son goût pour la violence qu’il exprime dès L’Homme de la loi, et qui vont s’accentuer dans ses films ultérieurs. Ce western contient plusieurs scènes assez choquantes. On y voit Burt Lancaster tuer un homme dans le dos alors qu’il est censé être le héros du film, ou alors Lee J. Cobb se tirer une balle dans la bouche après avoir constaté la mort de son fils. Autant de manifestations d’une ambiguïté morale et d’une frontalité dans la représentation de la violence inhabituelles y compris dans le western italien, qui entérinent la fin d’une époque et le crépuscule des mythes liés au western classique.

 

L’Homme de la loi est proposé en combo Blu-ray et DVD par Sidonis, dans la collection « westerns de légende ».

 

A noter également la parution du mook Prime Cut dont le premier numéro (228 pages) est consacré à Michael Winner (édition the Ecstasy of Films).

Catégories : Actualités

Un commentaire

  1. Emmanuel dit :

    A relire l’historique des critiques, Winner a été haï à partir de Death Wish, film jugé droitier par une critique majoritairement de gauche qui depuis ce film a même relu à la baisse ses films antérieurs. Les suivants n’ont pas mieux été traités, pourtant The Big sleep est un des derniers films réellement valables de la fin de carrière de Mitchum. Firepower, brillamment mis en scène qui montre l’industrie pharmaceutique comme une organisation mafieuse et a réévaluer sans aucun doute. On aimerait bien voir The Wicked lady et surtout toute sa période anglaise mais là je n’y crois guère. Je me demande aussi qui a vu un jour le curieux Won ton ton…

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