Olivier Père

Boulevard de la mort de Quentin Tarantino

ARTE diffuse Boulevard de la mort (Death Proof, 2007) de Quentin Tarantino dimanche 27 mars à 21h.

Au-delà de l’hommage fétichiste au cinéma d’exploitation des années 70, imaginé avec son complice de l’époque Robert Rodriguez, Boulevard de la mort est le film le plus expérimental de Quentin Tarantino. Son amour des dialogues, des acteurs et des actrices se double ici d’une grande inventivité stylistique. La virtuosité du cinéaste ne se limite pas à l’écriture de scènes digressives, portées par le bagout de leurs interprètes, mais concerne également la photographie et la structure du film : son enveloppe visuelle et son déroulement, marqués par de nombreux accidents. Boulevard de la mort s’affranchit des règles narratives classiques pour proposer une histoire scindée en son milieu, qui déjoue les attentes du spectateur. On y trouve l’empreinte de Psychose d’Alfred Hitchcock, qui lui aussi filmait l’assassinat de l’héroïne de manière prématurée et inattendue. La première partie de Boulevard de la mort déroule le plan diabolique d’un tueur en série, ancien cascadeur au visage balafré, qui utilise sa voiture comme une arme phallique. Il s’introduit telle une ombre menaçante dans le film qui accompagnait jusqu’alors plusieurs jeunes femmes désireuses de prendre du bon temps dans un bar. La seconde reproduit le même dispositif, mais transforme ses victimes désignées, un nouveau groupe d’amies, en furies vengeresses. Tarantino imagine un double programme sexy à l’intérieur du même film, qui inverse le rapport de domination entre le chasseur et ses proies, et se conclut par le triomphe de la féminité. Il se dégage de ce film un profond sentiment de jubilation, procuré par les scènes de comédie entre filles, l’utilisation de la musique mais aussi les incroyables séquences de cascades et de poursuites automobiles.

 

Boulevard de la mort est disponible gratuitement en télévision de rattrapage sur Arte.tv du du 27/03/2022 au 02/04/2022.

 

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3 commentaires

  1. Damien dit :

    Je me demandais si, pour des réalisateurs comme Tarantino ou Scorsese qui sont très attaché au genre et a la musique, leur méthode ne constituait pas, en premier, à choisir une période (par exemple les années 70), ensuite leurs musiques préférées sur cette période, et en dernier l’histoire ( un événement d’actualité marquant de cette période ). De la musique ou de la chanson découle le séquençage des scènes et le montage.
    Ou, d’après vous, c’est l’inverse, c’est a dire, viendrait à la fin la musique ?
    Dans JACKIE BROWN ou IL ÉTAIT UNE FOIS A HOLLYWOOD et CASINO, les déplacements des acteurs collent exactement avec la chanson comme si la chanson était déjà connue et présente au moment même du tournage.
    Bien à vous

  2. Olivier Père dit :

    Il faudrait chercher dans des entretiens j’imagine qu’ils ont déjà répondu à cette question importante. J’ai le souvenir que Tarantino choisit les chansons et les morceaux musicaux avant même l’écriture du scénario, quand il commence à penser à un nouveau projet, et qu’il puise dans sa discothèque. il le confirme ici :
    https://faroutmagazine.co.uk/quentin-tarantino-music-in-his-movies/

  3. Damien dit :

    Merci beaucoup pour le lien. Très instructif.
    J’imaginais que la musique avait une place importante chez Tarantino mais pas jusqu’à ce qu’elle soit au départ même du processus créatif.
    Ce qu’il y a de bien avec Tarantino, c’est qu’il dit les choses franchement car pour beaucoup de cinéastes, admettre de mettre les chansons autant en avant, au détriment du scénario, doit être sacrilège.

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