Olivier Père

Detroit de Kathryn Bigelow

ARTE inaugure son cycle consacré à Kathryn Bigelow en diffusant Detroit (2017), le dernier film en date de la réalisatrice, dimanche 27 septembre à 20h55.

En juillet 1967, d’importantes émeutes ont lieu dans la ville de Detroit, pour protester contre la ségrégation raciale aux États-Unis et la guerre du Vietnam. C’est dans ce contexte explosif qu’une intervention de police dans un motel va déboucher sur une bavure criminelle mue par le racisme, le sadisme et le sentiment d’impunité de jeunes membres de forces de l’ordre. Après des films consacrés à la criminalité, aux opérations militaires ou à la lutte contre le terrorisme, Kathryn Bigelow poursuit sa réflexion sur la place de la violence dans l’Amérique moderne. Elle retrouve pour Detroit le scénariste et journaliste Mark Boal, qui avait déjà écrit Démineurs et Zero Dark Thirty. On a le droit d’appréhender cette série de films réalisés consécutivement comme une trilogie, opus majeur à l’intérieur de son oeuvre. Après un regard critique sur la guerre en Irak et la traque de Ben Laden, la reconstitution d’une page honteuse de l’histoire de son pays permet à Bigelow et Boal de dénoncer un scandale à l’actualité toujours aussi brûlante, celui des injustices dont sont victimes les citoyens noirs sur le sol américain. Le style percutant de la cinéaste s’accompagne ici d’une gestion magistrale du temps et de l’espace, pour décrire une ville en proie au chaos, et des hommes qui basculent dans l’inhumanité. Dans Detroit, Bigelow radicalise son propos et son travail de cinéaste. En accord avec le sujet et le traitement de son film, elle renonce à la présence de vedettes au générique, avantageusement remplacées par d’excellents jeunes comédiens. L’approche hyper réaliste de Bigelow, entre faux reportage et cauchemar éveillé, la situe dans la lignée directe de réalisateurs tels que John Frankenheimer, William Friedkin ou Michael Mann.

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