Olivier Père

Une femme dans la tourmente de Mikio Naruse

Dans le cadre de son cycle consacré au cinéma japonais, ARTE diffuse Une femme dans la tourmente (Midareru, 1964) de Mikio Naruse lundi 3 août à 22h45. Inédit en France, Une femme dans la tourmente avait enfin bénéficié d’une distribution en salles en 2015. Le film sera également disponible gratuitement en télévision de rattrapage jusqu’au 31 octobre 2020.

Une jeune veuve de guerre a sacrifié sa vie sentimentale en choisissant de s’occuper de la petite épicerie familiale, qu’elle a fait prospérer à force de travail. Mais l’installation dans le quartier d’un supermarché vient mettre en danger le petit commerce. C’est alors que Koji, son beau-frère, revient à la maison après avoir quitté son emploi à Tokyo… La possibilité d’une nouvelle relation amoureuse conduira à un dernier sacrifice.

Longtemps ignoré par la critique occidentale, Mikio Naruse est aujourd’hui considéré comme l’un des plus grands cinéastes japonais. Ses films décrivent, avec un certain pessimisme, l’existence de gens ordinaires, accablés par le poids des traditions ou les paradoxes du Japon moderne. Son œuvre trouve son apogée avec une série de magnifiques portraits de femmes. Naruse y exprime sa compassion pour des héroïnes de la vie quotidienne, régulièrement interprétées par Hideko Takamine, qui apparaît dans dix-sept de ses films, parmi lesquels les célèbres L’Éclair ou Nuages flottants. Hideko Takamine, qui avait débuté sa carrière enfant, fut une actrice extrêmement populaire du cinéma japonais des années 60. L’égérie du réalisateur est bouleversante dans Une femme dans la tourmente, l’un des chefs-d’œuvre de Naruse réalisé au soir d’une longue carrière. Le classicisme de la mise en scène évacue toute forme d’emphase et se montre au diapason du regard humaniste que pose le cinéaste sur ses personnages.

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Un commentaire

  1. Snoopy18 dit :

    Un gros plan de visage pour final, celui d’Hideko Takamine figé dans la stupeur et l’effroi.
    Certainement l’un des plus beaux de l’histoire du cinéma.
    Reiko a déjà tout perdu: son mari, sa belle famille, son travail. Elle vient juste de découvrir la mort accidentelle de son beau frère qui la courtisait.
    Je suis persuadé que Naruse a pensé à ce plan hypnotisant bien avant de tourner le film. Il devait avoir en tête son cadrage, sa durée déjà déterminée à la seconde près. Quitter ce visage constitue une vraie souffrance car il n’y a plus rien derrière, rien qu’un écran noir. Reiko contemple alors le gouffre qui s’ouvre devant elle, le néant de la vie qui lui reste à vivre.
    Fascinant film qui bascule dans sa dernière partie, lors d’un voyage en train propulsant toute son énergie cinétique au déroulement des événements. Ce trajet ferroviaire donne lieu à une scène de rapprochement magique, conçue par un artisan encore inspiré du muet( type de scènette sans dialogues que l’on retrouve dans le final de « Cluny Brown » à travers la vitrine). Alors, tout le reste du film n’est que superflu, inutile; il demeure ce voyage en train et ce gros plan inoubliable sur une actrice addictive. Vingt minutes fulgurantes qui font un chef d’œuvre.

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